Le Suisse face à la meute des Norma

Même si sa Tatuus PY 12 souffre d’un excès de poids et d’un manque de performance face aux Norma de nouvelle génération, Jean-Jacques Maitre a toujours su tirer son épingle du jeu sur le Championnat de France de la Montagne. En 2014 et 2016, il terminait à deux reprises à la deuxième place du Challenge Open CN/2, un résultat probant assorti d’une belle 10ème place au Championnat à l’issue de la saison 2016. A nouveau en lice en 2017, le Suisse savait qu’il devrait affronter une concurrence plus affutée que jamais, et qu’il lui serait difficile de rivaliser face à des pilotes mieux armés que lui.

Ancien cycliste, c’est par le Karting que Jean-Jacques Maitre est venu à la compétition automobile. Il s’essaiera ensuite au circuit avant de disputer ses premières courses de côte au volant d’une Norma rachetée à Cyrille Frantz. Viendra ensuite la Tatuus PY 12, toujours propulsée par un moteur 2 litres, voiture à laquelle il est resté fidèle.

Une Tatuus face aux Norma
Une fidélité qui a un prix, puisque son Proto affiche un poids supérieur de plus de 40 kilos par rapport à ses concurrents : « Mais ce ne sont pas les seules raisons qui faisaient que cette saison 2017 s’annonçait difficile », reconnait en toute honnêteté le pilote suisse. « Le plateau s’est plus que sérieusement étoffé en CN/2, et l’on a vu l’arrivée de jeunes pilotes particulièrement talentueux. Face à des concurrents que je considère comme plus chevronnés que moi, et à l’intégration dans la catégorie de valeur montante, j’étais tout à fait conscient qu’il me serait difficile de lutter à nouveau pour le podium. »

Un travail conséquent a été réalisé sur la Tatuus au terme de la saison 2016, « mais cela n’avait pas apporté les résultats escomptés. Je dois avouer que j’étais déçu du résultat, l’investissement engagé n’a pas porté ses fruits. » Seul pilote à évoluer au volant d’une Tatuus, Jean-Jacques Maitre a comme désavantage d’être pénalisé par le manque d’informations : « Mes adversaires, qui roulent en Norma, s’échangent des informations sur les réglages, les améliorations à apporter, ce qui leur permet de faire progresser leurs voitures. Moi je ne dois me fier qu’à moi-même et à mon ressenti, ce qui n’est pas toujours évident. »

Face aux enjeux qui l’attendaient, Jean-Jacques n’avait d’autres ambitions que d’essayer d’améliorer ses chronos des saisons précédentes : « Je savais qu’il aurait été déraisonnable de me fixer des objectifs en termes de résultats, j’espérais donc avant tout améliorer mes propres performances. J’abordais les courses les unes après les autres, sans vraiment me préoccuper de mes adversaires, et en me concentrant sur mes propres performances. »

Initialement, Jean-Jacques Maitre devait être présent à Bagnols-Sabran. Mais les amortisseurs qui devaient équiper sa Tatuus s’égaraient dans les méandres de La Poste, et le Suisse devait donc faire l’impasse sur ce premier rendez-vous de la saison.

Problèmes d’amortisseurs récurrents en début de saison
C’est dans un laps de temps très limité que son équipe parvenait à monter les amortisseurs juste avant le Col Saint-Pierre, « et là on s’est rendu compte que nous avions un problème pour les ajuster, et j’ai dû courir le Saint-Pierre en étant un peu à ’’la ramasse’’. De plus j’ai connu un souci de freins, qui a nécessité un changement de disques, et j’ai dû composer avec de grosses vibrations… Pas idéal pour débuter la saison, je ne me suis pas fait plaisir durant ce week-end qui est pour moi à oublier. »

Ses amortisseurs allaient à nouveau lui créer quelques soucis sur la Course de Côte d’Abreschviller, où Jean-Jacques accroche finalement la septième place des CN/2 : « J’ai dû rouler avec des amortisseurs qui fuyaient, qui perdait leur huile. Sur un tracé comme celui d’Abreschviller ce n’était pas évident. Mais à côté de ça, je suis très content de mes chronos réalisés dans des conditions difficiles, avec des amortisseurs privés d’huile. »

En 2017, les trois rendez-vous de l’Ouest s’enchaînaient à un week-end d’intervalle. Difficile de ce fait de travailler sur la Tatuus et d’améliorer les choses. C’est donc avec des problèmes d’amortisseurs récurrents que Jean-Jacques abordait ces trois rendez-vous : « J’ai rencontré les mêmes problèmes en course à Thèreval, ça a continué à La Pommeraye, et j’ai pu apporter quelques améliorations à Saint Gouëno », confie le Suisse qui faisait preuve d’une belle régularité en terminant à trois reprises à la sixième place du CN/2. En Bretagne, il pointait le museau de sa Tatuus dans le top 10 : « Saint Gouëno est une course que j’affectionne particulièrement, et les conditions changeantes gomment un peu les différences de performances des voitures, ce qui ne peut être qu’à mon avantage. »

Marchampt en Beaujolais offre aux concurrents un tracé rapide et technique, et là encore Jean-Jacques Maitre aura dû mal, lors de cette 56ème édition, à se mettre en valeur : « Ma voiture n’a jamais été compétitive, et moi non plus », confie-t-il dans un sourire. « C’est un parcours qui ne convient pas vraiment au profil de la Tatuus, et sur lequel je n’ai jamais vraiment été à mon aise », reconnait-il. « Ce fut un week-end assez compliqué. »

Plus qu’une course de côte, l’édition 2017 de Vuillafans sera une véritable loterie, sur laquelle il fallait être idéalement placé pour éviter la pluie. Avec une Tatuus flanquée du numéro 10, Jean-Jacques s’élançait samedi parmi les derniers : « Ce qui pour être honnête ne m’a pas facilité les choses. Finalement, tout le week-end fut compliqué, mais pas seulement pour moi mais pour l’ensemble des concurrents. Me concernant, j’ai pu rouler sur des montées partiellement sèches, mais avec le haut du parcours systématiquement humide, ce qui interdisait de réaliser des prouesses. »

Ce sont vingt-cinq Protos 2 litres qui se présentaient au départ du Mont-Dore. Une concurrence énorme pour Jean-Jacques qui s’attendait à un week-end difficile : « Le Mont-Dore est toujours compliqué, mais finalement je suis très content de mes chronos. J’abordais avant tout cette course comme une séance d’essais grandeur nature avant de me rendre aux Rangiers, épreuve disputée pour moi à domicile », explique-t-il. « Sur ce Mont-Dore je n’avais évidemment pas la prétention de défier les hommes forts du CN/2, qui cette année évoluent dans un univers différent du mien et de ma Tatuus. »

Belle performance à domicile
S’il y a une course que Jean-Jacques ne raterait pour rien au monde, c’est bien celle de Saint Ursanne – Les Rangiers. C’est cette épreuve qui, alors qu’il était enfant, lui a permis de découvrir le sport automobile et de se passionner pour la discipline. Le Suisse a donc chaque année à cœur de briller sur son épreuve à domicile : « Il y a un nombre important de concurrents Jurassiens au départ, et je termine en tête des Jurassiens, ce qui me satisfait pleinement. Ensuite je termine deuxième de ma classe derrière Corentin (Starck), qui m’est passé devant sur la dernière montée de course. Compte tenu du plateau et de mes prestations, le bilan est pour moi très satisfaisant. »

A Chamrousse, Jean-Jacques n’aura l’opportunité de ne prendre part qu’à une seule montée avant de devoir renoncer : « Là encore j’ai eu des problèmes avec le comportement de ma voiture. Je suis parti en tête-à-queue sans parvenir à expliquer pourquoi. » Un comportement erratique de sa Tatuus qui poussait Jean-Jacques à abandonner plutôt que de prendre des risques inconsidérés.

S’il termine sixième du CN/2 sur la Course de Côte de Turckheim, Jean-Jacques avoue être mécontent de sa prestation sur l’épreuve alsacienne : « Je ne parviens pas à comprendre pourquoi j’ai signé cette année d’aussi mauvais chronos par rapport à 2016. Quand je visionne la caméra embarquée, que j’étudie les acquisitions, rien n’explique cette contre-performance. J’avais le sentiment que ça fonctionnait bien, mais à l’arrivée le chrono n’était pas là. C’était un peu frustrant. »

A Limonest, la pluie incitait Jean-Jacques à ne pas prendre part à la dernière montée disputée dimanche : « Je n’avais rien à gagner, aucune raison de prendre des risques, et je ne voulais surtout pas endommager la voiture. J’ai donc quitté Limonest à l’issue de la deuxième montée, mais ma voiture n’étant pas en parc à l’issue de la course, je ne suis finalement pas classé. »

C’est un bilan mitigé que fait Jean-Jacques Maitre lorsqu’il analyse sa saison 2017 : « L’aspect positif c’est que je suis parvenu, comme je le souhaitais, à améliorer mes chronos tout au long de la saison. Et ce malgré les problèmes que j’ai pu rencontrer en début d’année et lors de la campagne de l’Ouest », confie Jean-Jacques qui termine onzième du Challenge : « En ce qui concerne ma position, je ne peux évident pas être réellement satisfait, mais je savais ce qui m’attendait face à une concurrence qui s’est énormément renforcée. »

Malgré l’expérience, les années qui défilent, Jean-Jacques se sent toujours comme un privilégié, et c’est ce qu’il veut avant tout retenir : « S’il y a une chose qui est extrêmement positive et qui surpasse tout le reste, c’est que je suis toujours là, à assouvir ma passion, dans une ambiance que j’apprécie énormément, et à ce titre je suis réellement satisfait. J’en profite pour remercier avant tout les organisateurs et les commissaires sans qui il n’y aurait pas de course et sans qui nous ne pourrions pas nous faire plaisir tous les week-ends. Merci à ma famille, à mes proches, à l’ensemble du Team Frantz Racing et à Benjamin Vielmi aux côtés de qui j’évoluais cette saison. Un grand merci également à mes partenaires. »
 
Le programme de Jean-Jacques Maitre n’est pas totalement arrêté en ce qui concerne 2018 : « La seule certitude, pour le moment, c’est que je ne serai pas au départ des deux premières manches de la saison, Bagnols-Sabran et le Saint-Pierre. Pour le reste, j’ai toujours la Tatuus mais je ne sais pas si je vais courir à son volant. J’ai envie de faire un peu de circuit, de prendre part à plus de manches du Championnat Suisse, et de disputer peut-être cinq ou six manches du Championnat de France de la Montagne. A côté de cela, j’ai beaucoup de projets professionnels qui risquent de m’accaparer et de peser dans mes choix concernant la compétition », conclut le Suisse.

Propos recueillis par Bruno Valette

Retrouvez le portrait et le bilan 2016 de Jean-Jacques Maitre.


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