A l’issue de la pire de ses saisons…

Le sport automobile demande une bonne dose de fatalisme. Car quand les problèmes surviennent, ils ont souvent tendance à s’accumuler. Ce fut le cas, durant cette saison 2017, pour Christophe Poinsignon, qui est tombé de Charybde en Scylla… Il aura donc fallu toute la détermination du Vosgien, pour remporter au terme de cette saison, son troisième Challenge Open consécutif.

Si 2017 s’est avéré compliqué, Christophe Poinsignon avait pourtant mis tout en œuvre pour aborder ce Championnat dans les meilleures conditions. Chez les Poinsignon on court en famille, et si les efforts familiaux s’étaient concentrés en 2016 sur Yannick et sa nouvelle BMW M3 E92, la pause hivernale avant la campagne 2017 était consacrée au CG de Christophe.

Une nouvelle fois, c’est Guy, le papa de nos deux pilotes, qui se retroussait les manches et s’investissait durant de nombreuses heures, pour livrer à Christophe une auto revue dans le moindre détail : « Nous avons rencontré une succession de problèmes durant la saison 2016, ce qui nous a incité durant tout l’hiver à démonter la voiture dans son intégralité pour la reconstruire », explique Christophe. « On a décoqué l’auto, fait sabler le châssis, tenté de l’alléger au maximum, modifié la lame avant, changé la boîte de vitesses pour adopter une séquentielle, refait un moteur neuf dans son intégralité, refait le faisceau d’alimentation, monté des disques neufs et des plaquettes neuves… On repartait vraiment avec une auto que l’on pouvait considérer comme neuve. »

L’objectif de Christophe Poinsignon, avec sa Simca CG Turbo, était de prendre part à l’intégralité du Championnat de France de la Montagne : « Compte tenu du travail que nous avions réalisé sur la voiture, je pouvais espérer connaitre une belle saison. Je souhaitais avant tout être au départ de toutes les manches inscrites au calendrier, ce que je n’avais jamais eu l’opportunité de faire jusqu’à présent. » Malheureusement pour Christophe, tout n’allait pas se passer comme il l’espérait : « Nous avons pris du retard dans la préparation, et la sortie de Yannick à Bagnols-Sabran nous a fait prendre un retard supplémentaire. De ce fait, j’ai dû faire l’impasse sur les trois premières manches de la saison : Bagnols-Sabran, le Col Saint-Pierre et Abreschviller. »

Faux départ à Thèreval
Bien présent à Thèreval, Christophe n’abordait pas l’épreuve normande dans les meilleures conditions : « Nous n’avions toujours pas eu le temps de changer le boitier de la gestion moteur et le faisceau qui l’alimente. Le retard pris était conséquent, et je n’avais pas eu l’opportunité de faire, ne serait-ce qu’un mètre au volant de la voiture », explique le Lorrain. « Avant les essais, j’ai voulu tester l’auto, afin notamment de roder les freins. J’ai pu enclancher les deux premiers rapports de boite, avant que cette dernière ne refuse de rétrograder. En fait, nous nous sommes rendu compte à ce moment-là que nous avions un problème de tringlerie, l’empilement des rapports de la nouvelle boîte n’étant pas le même que sur l’ancienne. Ça doit se jouer à 6 millimètres, mais ça ne peut pas fonctionner. Sur le banc, lorsque l’on montait les rapports, tout semblait fonctionner parfaitement, mais en utilisation sur la route, dès que j’essayais de rétrograder, ça n’allait plus. » Ce n’est évidemment pas de gaieté de cœur que Christophe Poinsignon devait se résoudre à renoncer à prendre part à cette quatrième manche de la saison.

Les diverses élections qui ont marqué l’année 2017 obligeaient les organisateurs des trois manches de l’Ouest à se regrouper sur trois week-end successifs. Un scénario pénalisant lorsque l’on connait un problème mécanique, le laps de temps disponible pour solutionner les problèmes étant dérisoire. Malgré tout, entouré des siens, Christophe parvenait à réparer sa boîte à la veille de La Pommeraye : « Le CG restait dans l’Ouest entre les épreuves, et nous sommes retournés chez nous récupérer l’ancienne boite. Sur place, Benjamin Vielmi m’a donné un coup de main pour la remonter et je n’avais alors plus de souci pour monter et descendre les rapports. »

Mais ce n’est pas pour autant que Christophe Poinsignon allait connaitre un week-end paisible : « Cette fois c’est le moteur qui, comme les années précédentes, allait me causer de nouvelles difficultés. A chaque changement de rapports, j’avais un trou, une perte totale de puissance. » Si l’objectif premier de Christophe était de remporter un nouveau succès de groupe, il devait rapidement revoir ses ambitions à la baisse : « J’apprécie réellement le tracé de La Pommeraye, et je sais pouvoir réaliser sur cette épreuve de bonnes performances, mais dans ces conditions c’était tout simplement impossible. C’était frustrant de ne pouvoir rien faire », avoue Christophe qui termine troisième du FC, derrière Xavier Burgevin et Geoffray Carcreff, mais qui ne perdait pas sa motivation pour autant.

Les problèmes allaient perdurer à Saint Gouëno, où là encore le Vosgien devait composer avec un moteur qui perdait toute puissance durant un laps de temps, à chaque changement de rapports : « Il a fallu faire avec. Et comme quand ça ne va pas les choses ne font souvent qu’empirer, j’ai fait un tête-à-queue sur la montée qui s’avérera la plus rapide. C’est un loupé complet, heureusement que je conserve comme souvenir la semaine de vacances que nous avons passée dans la région. Ma mère, qui n’était pas venue sur une course depuis un bon moment était présente, et nous avons pu partager cette semaine en famille, ce qui est toujours très plaisant. Et puis à Saint Gouëno l’organisation est toujours au top. »

De retour de la campagne de l’Ouest, Guy Poinsignon remettait les mains dans la mécanique pour changer le boitier et l’ensemble du faisceau. Il en profitait pour modifier le fonctionnement du compresseur, qui jusqu’alors soufflait en parallèle du turbo, et qui suite à cette intervention pouvait alimenter directement le turbo. Tout semblait alors en place pour que Christophe dispose d’une auto enfin compétitive à l’heure d’affronter le tracé de Marchampt en Beaujolais : « Effectivement, le moteur donnait sa pleine mesure. J’avais même l’impression d’évoluer avec un moteur atmosphérique tellement la poussée était linéaire. On a perdu un peu de puissance à partir de 7000 tr/mn, mais pour le reste ça fonctionnait très bien. »

Premier succès dans la difficulté
On pourrait penser que la deuxième partie de saison se présentait sous de meilleurs augures, Il n’en sera rien : « J’ai à nouveau rencontré des problèmes de changements de vitesses. Lorsque je montais les rapports, par moments, les vitesses avaient du mal à rentrer. Quand je tentais de rétrograder, c’était un calvaire. Je devais appuyer cinq ou six fois sur le levier avant de parvenir à enclencher la quatrième. Ça devenait dangereux, le moteur ne freinait pas sur les rétrogradage. » Malgré ses déboires, et même s’il signait un chrono trois secondes plus lent qu’en 2016, Christophe parvenait à accrocher la victoire de groupe sur cette épreuve de Marchampt.

A Vuillafans, où il s’imposait à nouveau en FC, Christophe rencontrait encore des problèmes et ne parviendra pas à rééditer ses chronos des éditions précédentes : « Nous avons apporté la boite chez un ami qui nous l’a refait en prenant bien soin de tous les petits éléments qui la composent, et qui rendent complexe son agencement et toutes interventions. C’est quasiment de l’horlogerie suisse, et le moindre défaut peut engendrer un dysfonctionnement total », explique Christophe. « Mais malgré tout le soin apporté, ça ne fonctionnait toujours pas correctement, et là je ne pouvais plus rouler en confiance car je ne savais pas à chaque rétrogradage si la vitesse allait rentrer. De ce fait, j’ai roulé sur la réserve. »

Christophe allait connaitre une embellie à Dunières, même s’il devait composer encore avec quelques problèmes : « Sur la dernière montée, j’ai une nouvelle fois loupé un rapport. Mais malgré cela, je suis parvenu à aller vite et je signe un chrono à un ou deux dixièmes de celui réalisé l’an passé. C’était plutôt pas mal, et j’ai pu reprendre en grande partie confiance en l’auto », avoue Christophe qui place sa Simca CG Turbo à la sixième place et s’offre une nouvelle victoire de groupe.

A l’occasion du Mont-Dore, la famille Poinsignon s’agrandissait. Et alors que tonton Yannick accrochait une magnifique deuxième place derrière Pierre Courroye, Marie accouchait d’un petit Ewen et Christophe devenait donc papa pour la deuxième fois. Bien évidemment Christophe n’était pas présent au Mont-Dore, ce qui n’empêchait pas le clan Poinsignon de fêter dignement la performance de Yannick et la nouvelle paternité de son cadet.

C’est à Chamrousse que Christophe retrouvait le volant de sa Simca CG Turbo. Et pour l’occasion il se positionnait au sixième rang, juste derrière la BMW de son frère. Une nouvelle belle performance assortie d’une victoire de groupe : « Tout semblait rentrer dans l’ordre, même si je suis assez loin des temps que j’ai l’habitude de réaliser. Et puis, comme Yannick, j’ai eu quelques problèmes pour tourner dans certaines épingles. Mais le pire, c’est que j’ai cassé une courroie de compresseur, et que je ne savais pas à ce moment-là que ce problème allait devenir récurrent. »

Christophe allait en effet boire le calice jusqu’à la lie, car s’il parvenait à remporter un nouveau succès de groupe à Turckheim, ce sera une nouvelle fois en devant composer avec une multitude de déboires : « La boite de dégradait de plus en plus au fil des montées, et à chaque départ je ne parvenais que très difficilement à enclencher la deuxième. Et si mes souvenirs sont bons, sur le week-end, je casse deux courroies de compresseur. D’ailleurs je ne serais pas au départ de la dernière montée, parce que je n’avais plus de courroie à disposition. »

L’accumulation de ses problèmes font occulter à Christophe que depuis le début de saison il rencontrait des difficultés avec le train avant de sa voiture : « La voiture sous-virait dans le serré, mais c’est presque dérisoire face aux nombreux ennuis que j’ai cumulés. »

« Je ne sais plus si j’ai cassé deux ou trois courroies de compresseur à Limonest », tente de se souvenir Christophe. Le fait est que, si le Vosgien remporte une nouvelle victoire de groupe en terminant cinquième au général, il n’aura pas, pour cette ultime confrontation de la saison, été épargné : « Je suis très loin des temps réalisés lors des précédentes éditions. Par contre je suis devenu expert dans le changement des courroies de compression. En milieu de saison, mon ami Stéphane Kieffer, qui nous a donné un bon coup de main cette année, m’a expliqué comment changer une courroie en un minimum de temps, en étant à deux. Heureusement qu’il m’épaulait entre les montées, sinon je ne m’en serais pas sorti. » Comble de malchance, samedi lors des essais de Limonest, Christophe prenait conscience que le train avant de sa voiture était totalement déréglé, ce qui obligeait Guy Poinsignon à intervenir pour rectifier le tir : « Ça m’a permis d’être mieux le dimanche, mais ce n’était toutefois pas au top. »

Troisième victoire consécutive sur le Challenge Open
Vainqueur du Challenge Open Hors Catégorie Production en 2015, du Challenge Open FC/4 en 2016, Christophe Poinsignon inscrit un nouveau Challenge à son palmarès en terminant cette année 2017 en tête de l’Open Hors Catégorie Production. Mais si le succès est bien au rendez-vous, le Lorrain ne peut tirer un bilan positif d’une saison durant laquelle les problèmes se sont succédé : « Ce fut ma saison la plus compliquée, la pire de ma carrière sportive », estime Christophe. « Le plus difficile à accepter, c’est d’avoir travaillé avec mon père comme des forcenés pour que je dispose d’une voiture quasiment neuve, et que malgré cela, je n’ai pas pu profiter de cette saison. C’est frustrant et ça va m’obliger à une grosse remise en question. »

Renoncer est un mot qui ne fait pas partie du langage des Poinsignon. Il en faut plus pour entamer la détermination familiale. Combativité et bienveillance sont inscrits au patrimoine génétique du clan, et une nouvelle fois, Christophe et les siens veulent faire abstraction des problèmes et persévérer : « Avec Marie nous venons d’acheter une maison, je suis donc sur plusieurs projets à la fois. Mais mon père a déjà démonté la boite du CG pour savoir ce qu’il y avait lieu de faire. De toute manière, mon objectif est de faire une saison complète sur le Championnat de France de la Montagne, et j’espère bien y parvenir en 2018. »

Dans les moments de doute qu’à pu connaitre Christophe Poinsignon, la présence du clan, des amis et des partenaires est un soutien important qui permet de garder la tête froide : « Je tiens vraiment à les remercier, et en premier lieu remercier mon père qui depuis des années se donne à fond pour que Yannick et moi disposition de voitures compétitives. Cette saison, il a dû travailler sans relâche, et je tiens vraiment à lui rendre hommage. Merci à Marie, ma compagne qui est un soutien indéfectible, à l’ensemble de ma famille, à Stéphane Kieffer et à nos partenaires, le « Bar Au Bon accueil » à Hébécrevon, « Barba T P » Entreprise de Travaux publics à Aube, « Streit Groupe » Usinage et assemblage de pièces pour l’industrie automobile à Clerval, « Tenn-Glasz » tous types de clôtures et portails à Wisches, « Fra Presse » transports, services, presse à Richardménil, « Redline Performance » pilote instructeur à Sailly-Achâtel , « Earl Saint Wendelin », vins d’Alsace à Niedermorschwihr, « Epinal Express » transports toutes distances à Thaon Les Vosges. »

Propos recueillis par Bruno Valette

Retrouvez le portrait et le bilan 2016 de Christophe Poinsignon.


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