Les sentiments des Directeurs de Course

Garants de la sécurité, de l’équité sportive et du bon déroulement des épreuves, les Directeurs de Course assurent une mission primordiale sur l’ensemble des compétitions automobiles. Ces bénévoles, à la passion sans faille, doivent parfois supporter des critiques, souvent venues de ceux qui n’ont qu’une très vague idée de la complexité des missions attachées à leur domaine de compétence.

Directeur de course est un véritable sacerdoce, qui ne tolère aucune improvisation mais un sens aigu des responsabilités. Inconnus du grand public, de leurs décisions dépend pourtant en partie le dénouement d’une épreuve…

Sur le Championnat de France de la Montagne, ils étaient quatre en 2019, à se partager la direction des épreuves. Franck Mader ouvrait le bal à Bagnols-Sabran, avant qu’on ne le retrouve à Abreschviller et à Dunières, puis à Turckheim où il coiffait sa casquette d’organisateur et épaulait dans le même temps Jean-Claude Hector à la direction de course. Marc Habouzit avait à charge le Col Saint-Pierre, manche européenne du Championnat de France. Il sera par la suite à Vuillafans, avant de clôturer la saison à Limonest. Sur les épreuves de l’Ouest, c’est Christophe Ortiz qui officiait en qualité de Directeur de Course, avant de rejoindre le Mont-Dore. Daniel Blanquin, chronométreur sur bon nombre d’épreuves, se voyait confier la direction de course à Marchampt et à Chamrousse.

Des parcours très divers !
La genèse d’une passion peut être protéiforme. Les parcours de vie sont multiples et la découverte d’une inclination pour un domaine particulier diffère d’un individu à l’autre. Nos quatre directeurs de course ont connu des chemins bien différents avant de trouver leurs voies dans le monde du sport automobile.

C’est au milieu des années 60, qu’adolescent, Daniel Blanquin se rapprochait de l’ASA Thann au sein de laquelle était impliqué un de ses voisins : « Cela m’a permis de découvrir des rallyes, comme celui des Vosges, des courses de côtes comme celle de Sewen. » En 1971, Daniel intégrait à son tour cette ASA pour en devenir le secrétaire : « J’avais alors à charge de préparer les dossiers pour une course de côte régionale, un rallye et une paire de slaloms. » Rapidement, Daniel Blanquin réussissait à l’examen de commissaire, avant de devenir commissaire sportif adjoint puis titulaire : « Dans le même temps je suis devenu chronométreur, puis Directeur de Course. » Depuis lors, Daniel et son épouse Francine enchainent les épreuves en qualité de chronométreurs, lui assumant la fonction de Directeur de Course sur d’autres manifestations.

Alphonse Mader, mécanicien de son état chez Citroën, avait comme hobby de parvenir à fabriquer une auto en partants de deux modèles bien distincts. Son petit-fils, Franck, a donc baigné dans l’univers de la mécanique depuis sa plus tendre enfance : « Il m’a transmis la passion de tout ce qui possédait un moteur, de la mobylette au tracteur », reconnait Franck Mader.

Plus tard, c’est en devenant le propriétaire d’une société d’ambulance que Franck Mader aura l’occasion de rester au plus près de l’automobile. Et c’est en sa qualité d’ambulancier, que Charly Zumsteg faisait appel à lui pour assurer le transport d’éventuel blessés sur le Rallye Alsace-Vosges : « Leur prestataire leur avait fait faux bond, et j’ai été appelé à 1 heure du matin pour le remplacer au pied levé », se souvient Franck. Par la suite, Charly et Pati Zumsteg feront appel à lui pour qu’il intègre l’ASACAR afin de donner un coup de main : « Sans que je ne demande rien, ils m’ont averti que le samedi suivant j’étais inscrit pour la formation de directeur de course stagiaire. » C’est alors sur le Rallye de Lorraine que Franck allait assumer ses premières fonctions, et qu’il allait avoir un déclic : « Les interventions se succédaient, il fallait prendre des décisions dans l’urgence, être constamment réactif… Je me suis dit, ’’ça c’est pour moi !’’ L’adrénaline que cela procurait, la convivialité, les échanges, les responsabilités, la passion, c’était tout sauf ennuyeux et ça me correspondait totalement. »

Aussi étonnant que cela puisse paraitre, c’est également son métier d’ambulancier qui a permis à Marc Habouzit de découvrir la Course de Côte. Initialement, c’est par l’intermédiaire de sa société d’ambulance que Marc assurait la sécurité sur plusieurs épreuves régionales. Et à force de voir passer des voitures, l’envie lui prenait de s’installer à son tour derrière le volant : « En 1985, c’est au volant d’une Simca 1000 Rallye III que j’ai pris part à mes premières épreuves en rallye et en course de côte », se souvient-il.

Ensuite, Marc Habouzit évoluera aux volants de différentes Renault 5 Turbo, en commençant par la ’’Cévennes’’, avant porter son choix sur une ’’Tour de Corse’’ et de disposer finalement d’une ’’Maxi ’’. Pilote, Marc deviendra rapidement organisateur en étant élu à la présidence de l’ASA Velay Auvergne : « Cela fait 30 ans cette année que je préside aux destinées de cette ASA qui compte plus de 200 licenciés, et qui organise trois épreuves, le Rallye de la Fourme, la Course de Côte de Laussonne et le Rallye Velay Auvergne, ce qui représente du boulot. » Ses diverses activités, tant professionnelles qu’au sein de son ASA, ne laissaient plus suffisamment de temps à Marc pour rouler en rallye, il concentrait donc ses efforts sur le côte, « où j’ai évolué au volant de diverses monoplaces avant d’arrêter de courir en 2010. » Mais le fiston Thibault prenait la relève, puisqu’après avoir navigué son père dans l’habitacle d’une 306 Maxi, il s’illustre aujourd’hui au volant d’une Volkswagen Polo R5.

Gendarme de profession, Christophe Ortiz sera au début des années 90, affecté en Bretagne, à la brigade de Mauron. L’occasion pour lui de découvrir le sport automobile, puisqu’en 1991 il se rendait sur l’Autocross de Mauron : « Je venais assister à cette épreuve par curiosité, sans connaitre, et ce fut un véritable élément déclencheur. J’ai adoré le spectacle qui m’était offert. » A l’approche de la trentaine, alors qu’il n’avait auparavant jamais assisté à la moindre course de voiture si ce n’est devant sa télé en regardant la F1, Christophe Ortiz découvrait une passion qu’il concrétisait rapidement en entrant dans le comité d’organisation.

Secrétaire de l’épreuve, Christophe assumait cette fonction durant quatre ans : « Cela m’a permis de faire énormément de rencontres, parmi les officiels, les acteurs du sport automobile… Mais en 1998, j’ai été muté à quelques 120 kilomètres, à un un endroit où il n’y avait plus de course automobile. » Ne voulant quitter cet univers si attachant, Christophe Ortiz décidait de devenir commissaire, et il officiera pour la première fois sur l’Autocross de Campbon en 1999. En 2003, il devenait Directeur de Course stagiaire, et après une mission à Sarajevo dans le cadre de la gendarmerie, il passait son examen en 2005 : « Je n’avais pas alors comme ambition de diriger, mais je pensais pouvoir apporter quelque chose en m’investissant à un poste d’officiel autre que Commissaire, mission que je ne dénigre évidemment pas. »

Des débuts vers la Direction de Course
C’est en 2006, que pour la première fois Christophe Ortiz allait découvrir une épreuve asphalte à Saint Gouëno : « Et la même année le Rallye d’Armor. Je faisais mes premières armes sur l’asphalte en bénéficiant du soutien de personnalités du sport automobile local. Ensuite, j’ai rencontré Jean-Paul Cocquelet qui m’a apporté une aide précieuse en me transmettant son savoir. » Suite aux directives de la FFSA qui voulait que les Directeurs de Course adjoints disposent de la même licence que les Directeurs principaux, Christophe Ortiz passait son examen pour les épreuves routes. En 2017, à Saint Gouëno, il remplaçait Yves Lara qui décidait de prendre sa retraite : « Par la suite s’ajouteront les deux autres épreuves de l’Ouest, Thèreval et La Pommeraye, et l’an dernier le Mont-Dore. »

A ses débuts en tant qu’officiel, Daniel Blanquin était confronté à un chronométrage qui vivait ses balbutiements : « Nous avions certes des chronomètres fiables, mais les calculs pour le cumul des temps étaient confiés à ceux qui savaient correctement calculer. J’ai donc acheté un chrono Seiko réputé pour sa fiabilité, et je me suis vu confier le chronométrage de nombreuses épreuves du Comité Lorraine-Alsace. » Mais si le rôle de chronométreur lui permettait d’assouvir une passion aujourd’hui toujours intacte, Daniel souhaitait prendre de plus larges responsabilités : « C’est ce qui m’a incité, poussé par un de mes mentors au sein de l’ASA d’Alsace, à devenir Directeur de Course. » Une fonction que Daniel assure depuis 1975, alors que sur le Championnat de France de la Montagne, il dirige la course de Marchampt depuis cinq ans et Chamrousse lors des deux dernières éditions.

Si à l’origine Franck Mader dirigeait uniquement des épreuves courues dans l’Est, il n’allait pas tarder à être sollicité pour officier sur l’ensemble de l’hexagone : « Charly Zumsteg m’avait pris sous son aile et m’a fait découvrir le rallye tout-terrain, les rallyes terre, la course de côte. Et bien évidemment des épreuves en dehors de nos limites régionales. »

Malheureusement, l’ASACAR devait par la suite déposer le bilan, ce que Franck Mader avait du mal à accepter : « Vue l’énergie déployée par les bénévoles sur cette terre de passionnées qu’est l’Alsace, je me suis dit que l’on ne pouvait pas laisser tomber. J’ai pris la décision de créer une nouvelle ASA, avec une partie de l’ancienne équipe et en investissant sur mes propres deniers. » L’ASA d’Alsace voyait le jour est devenait organisateur technique de la Course de Côte de Turckheim, avant d’être affiliée à la FFSA et de pouvoir par la suite, assumer l’organisation administrative. Rapidement, l’ASA d’Alsace devenait une entité majeure, organisatrice de plusieurs épreuves de renom… Et Franck Mader allait en devenir le président.

Touche à tout du sport automobile, Marc Habouzit n’allait pas de son côté se contenter de piloter ou de présider son ASA. Il passait rapidement ses diplômes de Commissaires Sportif pour assurer de nombreuses directions de course : « C’est une passion que je partage avec mon épouse Christelle, elle-même directrice de course, et l’an dernier nous avons dirigé quelques 35 épreuves. »

A chacun son style et ses priorités !
Il est clair que la sécurité est le secteur qui retient avant tout l’attention des directeurs de course. Mais leurs attributions sont vastes, et bien évidemment ils ne doivent pas occulter d’autres parties essentielles relevant de leur domaine de compétence.

Marc Habouzit, par exemple, se veut inflexible sur la ponctualité. Il sait par expérience que la perte de temps ne se rattrape pas et qu’elle peut engendrer des difficultés qui mettent à mal l’ensemble de la manifestation : « En tant que pilote, la vitesse prime, et j’aborde la direction de course avec la même philosophie. Pour moi chaque intervention doit être un sprint, et s’il faut bien évidemment faire passer la sécurité avant tout, il faut également savoir gérer une interruption dans un laps de temps le plus court possible… »

Malheureusement pour Marc, son sens de la ponctualité n’est pas toujours partagé par les acteurs de la Course de Côte : « J’ai parfois à faire à des pilotes indisciplinés, qui ont tendance à se présenter en retard, et ça a le don de m’agacer… Quand tu fais de ton mieux pour que les pilotes puissent courir dans les meilleures conditions et en effectuant un maximum de montée, et que tu te retrouves confronté à des concurrents laxistes, c’est très pénible ! » Pour le reste, Marc Habouzit tient à ce que la mise en place des différents paramètres qui permettent la bonne tenue d’une épreuve soit décidée en concertation avec les pilotes : « Samedi soir, à l’issue des essais, j’essaie d’aller à la rencontre d’une majorité de concurrents pour savoir quel est leur ressenti, pour voir si certaines choses peuvent être à leur sens améliorées. »

« La sécurité avant tout », lâche Daniel Blanquin, « tant pour les spectateurs que pour les pilotes. J’ai été le témoin de nombreuses sorties de route, qui se sont soldées par des casses uniquement matérielles, fort heureusement. » Mais si lors de ses directions de course il a été épargné par les drames, Daniel garde en tête le souvenir d’accidents tragiques il y a une trentaine d’années. « Ca ne s’oublie pas, jamais, et de ce fait on reste focalisé sur la sécurité. »

Au fil des ans, Christophe Ortiz a appris à abordé les épreuves avec plus de sérénité : « En mettant en avant deux aspects majeurs : l’empathie et la discussion. Il faut être ouvert aux autres, essayer de comprendre, à partir de là la négociation devient possible. Evidemment je dois rester celui à qui appartient la décision finale, mais elle doit être prise après concertation avec les concurrents et l’ensemble des acteurs », estime Christophe qui, comme ses homologues fait de la sécurité sa priorité : « Tant la sécurité des pilotes que des commissaires, dont je me sens très proches puisque j’ai vécu ce qu’ils vivent aujourd’hui. »

S’il est un homme ce dialogue, Franck Mader possède également la droiture de ceux à qui il ne faut pas en compter. L’Alsacien garde à l’esprit qu’une Course de Côte est une épreuve sportive, et que de ce fait, l’équité doit régner en maitre : « Comme pour tous les directeurs de course, la priorité est pour moi un axe majeur, mais l’équité sportive est dans mon esprit primordiale. Durant mes années d’expérience, j’ai vécu des drames, ce qui m’incite bien évidemment à ne faire aucune concession sur la sécurité, mais j’ai énormément de mal à supporter l’injustice, et je mets un point d’honneur à ce que les confrontations se déroulent dans les règles et avec les mêmes chances pour tous. »

Franck Mader, qui a la réputation de gérer au mieux le bon déroulement des épreuves, sait que pour cela il doit parfois ’’trancher le nœud gordien’’ : « Nous entretenons de très bonnes relations avec les pilotes, mais ils doivent savoir qu’il ne peut y avoir pour autant de passe-droit. Amis ou simples relations, tous sont logés à la même enseigne. Et il est hors de question que l’on tente de me mettre la pression. D’ailleurs, l’erreur à ne pas commettre est de se laisser submerger par les critiques, de tenir compte des remarques, qu’elles viennent du terrain ou des réseaux sociaux. Quand je prends une décision, je m’y tiens, même si cela ne doit pas plaire à certains. »

Face aux drames et aux difficultés
Hommes d’expérience, les directeurs de course ont tous, sans exception, étaient marqués par des évènements difficiles voire dramatiques.

En 2016, Franck Mader dirigeait la manche d’ouverture du Championnat, Bagnols-Sabran, théâtre d’un accident dramatique qui allait couter la vie à Steve Cabelo : « C’était un gars de l’Est… La veille nous avions bu un coup ensemble et j’avais fait la connaissance de Pacôme, son fils alors âgé de six mois… Cette course était pour moi un passage de témoin avec Yves Lara qui souhaitait prendre du recul, la saison débutait, et ça ne devait pas se passer comme cela…  Cette disparition me marquera à vie ! »

L’an dernier, à Saint Gouëno, Christophe Ortiz a lui aussi connu une situation qui aurait pu s’avérer tragique, suite à la sortie de route d’Etienne Debarre : « Il était coincé dans sa voiture et ne sentait plus ses jambes. C’était très difficile comme moment, et je tiens vraiment à remercier tous ceux qui sont intervenus lors de cet accident qui m’a profondément marqué. »

Christophe n’oublie pas le Mont-Dore, sur lequel il officiait pour le première fois l’an dernier. La météo n’allait pas l’épargner, et des incompréhensions avec le Collège des Commissaires allaient engendrer de nombreuses polémiques : « J’ai dû me résoudre à arrêter l’épreuve avant son terme à cause de la pluie et du brouillard qui rendaient la visibilité totalement nulle. La sécurité n’étant pas assuré, je n’avais pas d’autre choix, même si stopper une épreuve est toujours un déchirement. Les décisions qui ont été prises par la suite ne m’appartiennent pas, je n’en suis en rien responsable. Mais j’ai été vilipendé, insulté même, et j’avoue que cela m’a profondément blessé. »

Présent en 2005 à Chamrousse, lors de l’accident qui allait contraindre Bernard Chamberod a mettre un terme à sa carrière, Daniel Blanquin se souvient de cette violente sortie qui marquait le pilote isérois dans sa chair : « Et puis je n’oublie pas la disparition de Christophe Henry, l’organisateur d’Abreschviller, qui en 2015 a été victime d’un infarctus alors qu’il était présent à Marchampt. Ce fut très dur à encaisser. » Mais fort heureusement, de nombreux accidents se soldent uniquement par de la casse mécanique : « Quand on intervient sur la sortie de route de Pierre Courroye à Marchampt, qu’on voit l’état de la McLaren et que l’on prend conscience que Pierre est indemne, on lâche un ouf de soulagement. Il en fut de même lors de la sortie de Philippe Schmitter qui a terminé sur le toit mais sort indemne d’un choc violent. »

Lorsque l’on évoque les souvenirs du Championnat, Marc Habouzit ne peut oublier sa première édition de Vuillafans en tant que Directeur de Course. Cette année-là, la pluie s’était invitée dans les débats. Victime d’une touchette lors des essais, Sébastien Petit n’avait pas été en mesure de signer de chronos. Comme le règlement le prévoit, il devait donc s’élancer en tête du Championnat Sport. Le ciel lui était clément puisqu’il passait systématiquement entre les gouttes pour venir arracher une insolente victoire : « Il m’a été reproché de ne pas avoir replacer Sébastien Petit. Une critique injustifiée puisque je devais m’en tenir au règlement, ce qui est mon rôle de Directeur de Course. Mais j’avoue que j’ai assez mal vécu les critiques, parfois exacerbées, à mon encontre. Ca m’a d’autant plus touché que c’était injuste, alors que j’avais fait ce que je devais faire et que les demandes que j’avais pu émettre auprès du Collège des Commissaires n’ont pas été entendues. »

Pour les Directeurs de Course, comme pour l’ensemble du personnel encadrant, les critiques sont d’autant plus difficiles à accepter, qu’elles mettent en cause des bénévoles, passionnés, qui assument souvent des sacrifices pour assouvir leur passion.

A chacun sa méthode
Pour Marc Habouzit les conditions dans lesquelles se déroulent les épreuves du Championnat de France de la Montagne, permettent d’assumer pleinement son rôle de Directeur de Course : « Il y a toujours des améliorations à apporter, mais dans l’ensemble tout fonctionne. J’ai pour habitude d’entretenir un dialogue permanent avec les organisateurs des épreuves sur lesquelles j’officie. Je leur explique ce que je veux mettre en place, et nous le réalisons d’un commun accord. A Vuillafans par exemple, où il est impossible de faire se croiser les voitures aux abords de la ligne de départ, nous avons décidé de disposer constamment d’un réservoir de concurrents prêts à s’élancer. C’est un gain de temps non négligeable », explique Marc qui dirige l’épreuve Franc-Comtoise depuis trois ans, le Col Saint-Pierre depuis deux ans et Limonest depuis cinq ans.

Dès le vendredi, jours habituellement consacré aux vérifications, jusqu’au dimanche soir, Daniel Blanquin considère qu’en qualité de Directeur de Course il est le patron : « De ce fait, je tiens à être informé de tout ce qui peut se produire, même dans les détails qui peuvent paraitre insignifiants. Tout peut être utile à l’heure de prendre une décision. » Des décisions d’autant plus difficiles à prendre que Daniel sait par expérience que de la topographie du terrain, de la logistique mise en place, des différents intervenants peut dépendre la bonne gestion d’un problème.

Christophe Ortiz a l’humilité de reconnaitre qu’il n’a pas suffisamment de recul, pour porter un jugement sur les domaines qui pourraient être améliorés : « Je pense que l’on a tout de même les moyens de mener à bien nos missions. Je parle de ce que je connais, et sur les épreuves de l’Ouest ça fonctionne parfaitement bien. Après, j’ai un vœu pieux, celui de pouvoir diriger une épreuve en constituant moi-même mon équipe, afin d’être entouré de gens dont je connais les réactions, sur qui je sais pouvoir totalement m’appuyer. Ca serait un luxe très appréciable. »

La demande de Christophe Ortiz n’est pas innocente. Car il sait qu’accepter une direction de course n’est pas dénué de responsabilités : « Face aux risques que l’on encourt en cas de problèmes graves, il y a finalement peu de volontaires pour assumer cette fonction. Cela demande il est vrai un réel investissement, car on ne doit pas oublier les journées de préparation avant une course. Le pire étant qu’au moindre couac, on est rapidement cloué au pilori, et c’est souvent difficile à accepter. »

Pour Franck Mader, la pratique de ses pairs est primordiale. C’est de l’observation de ses ainés qu’il s’est forgé sa propre expérience : « J’ai longtemps suivi le mode de fonctionnement de Jean-Paul Cocquelet ou de Yves Lara qui m’ont inculqué les ficelles. Aujourd’hui, j’ai adapté ses connaissances en les jumelant avec l’informatique, grâce à des logiciels qui me permettent de récupérer les infos du chronométrage et de rentrer les timings prévisionnels et réels. Cela me permet de savoir exactement où j’en suis. Pour moi, il faut impérativement gérer et jamais ne subir, sinon on court à la catastrophe. Cela vient en partie de mon expérience professionnelle, puisque j’ai l’habitude de travailler dans l’urgence, avec une bonne dose de stress, et qu’il faut savoir impérativement maîtriser. »

Quel avenir pour la Course de Côte ?
En cette période de confinement, de nombreuses questions se posent sur le devenir du Championnat de France de la Montagne. Mais depuis plusieurs saisons, la qualité des plateaux et le nombre de participants démontrent que les indicateurs sont au vert. De quoi être rassuré sur l’avenir !

La cohésion avec la réglementation européenne est pour Franck Mader une piste de travail importante sur laquelle il faut se pencher pour pérenniser la discipline : « Des avancées ont été faites avec l’intégration des E2-SC. Mais il faut aller au-delà pour ne pas se priver de concurrents étrangers qui évoluent au volant de magnifiques voitures. C’est frustrant pour nous, organisateurs frontaliers, de voir que notre réglementation manque de lisibilité pour les pilotes venus d’outre-Rhin », concède le Président de l’ASA d’Alsace. Très inspiré par l’aspect technique de la compétition, Franck est très attentif à la conformité des voitures, c’est pour lui essentiel dans son rôle de directeur de course : « Ce n’est pas nécessairement pour sanctionner, dans la majorité des cas, c’est par négligence que des pilotes ne sont pas conformes. Je veux avant tout les aider pour que l’équité sportive et les normes de sécurité soient respectées. »

La concertation entre Directeurs de Course est également une piste à explorer selon Franck Mader : « Je pense qu’il serait judicieux que l’on réunisse en début de saison, en dehors du Championnat, les Directeurs qui officient sur les épreuves. Nous ne sommes pas nombreux, et cela permettrait d’échanger, de mettre en commun nos idées. D’ailleurs je veux inviter les autres Directeurs de Course à Turckheim, sans qu’ils aient de fonction, juste pour qu’ils voient comment ça se passe. » Une idée qui ne déplaira pas à Christophe Ortiz, ce dernier avoue en effet qu’il est prêt à se rendre sur les autres épreuves du Championnat en qualité d’observateur libre.

Marc Habouzit avoue ne pas avoir d’inquiétude majeure pour notre Championnat qui, si on occulte la crise actuelle due au Covid-19, se porte plutôt bien : « De nouvelles voitures ont fait leur apparition ces dernières années, les plateaux se portent bien et la qualité est au rendez-vous. Il faut espérer que nous soyons sur une lancée qui ne va pas s’interrompre. Il faut impérativement aller de l’avant, c’est primordial pour évoluer. »

Le confinement risque, selon Daniel Blanquin, de faire des dégâts : « Les organisations risquent d’être impactées, les concurrents aussi. Le Covid-19 pourrait bien laisser des traces non seulement en 2020, mais pour les saisons à venir. Espérons que tout rentrera rapidement dans l’ordre. »

« La Course de Côte est vraiment une belle discipline », estime Christophe Ortiz qui se dit émerveillé par les cadres enchanteurs que proposent les différentes épreuves : « Nous avons également la chance d’avoir des bénévoles totalement impliqués, l’avenir devrait donc sourire à la discipline. »

Hommages et remerciements…
Marc Habouzit veut avoir une pensée pour tous ceux qui lui ont fait confiance et qui lui ont permis d’assouvir sa passion, non plus derrière le volant, mais aux commandes de différentes épreuves : « Merci notamment aux organisateurs des manches du Championnat de France de la Montagne qui ont fait appel à moi. Je peux leur assurer que je dirige leurs épreuves comme si c’était une course de mon ASA. L’an dernier, à Laussonne, avec 103 partants nous sommes parvenus à faire six montées d’essais le samedi et six montées le dimanche. Mais pour cela il faut être ponctuel et ordonné… Un grand merci à ceux qui gravitent autour du Championnat et notamment à Jean-Marc Roger, le Président de la Commission du Championnat de France de la Montagne. »

Pour conclure, Daniel Blanquin veut rendre hommage à Jean-Paul Cocquelet, disparu en 2016, et lui-même directeur de course durant de nombreuses années avant de devenir Président de la Commission du Championnat de France de la Montagne : « Je veux également remercier Daniel Demare qui m’a fait confiance pour que je dirige l’épreuve de Marchampt. Et je n’oublie pas Thierry Héritier, Directeur de Course adjoint à Marchampt, qui assure les interventions et avec qui je travaille en étroite collaboration. »

C’est vers l’ensemble des organisateurs que vont les pensées de Christophe Ortiz : « Je souhaite vraiment les remercier pour la confiance qu’ils m’ont accordé. Un grand merci aux commissaires, à tous les officiels, et j’ai une pensée ému pour tous ceux qui m’ont mis le pied à l’étrier et qui m’ont permis aujourd’hui d’assouvir pleinement ma passion. Je suis très heureux et très fier de ce que je fais aujourd’hui et je passe vraiment de magnifiques moments. »

A l’heure de conclure, Franck Mader veut adresser ses remerciements à ceux qui ont pu lui faire confiance : « En premier lieu Régis Court, l’organisateur de Bagnols-Sabran, avec qui nous avons vécu des moments très compliqués, avec un drame en 2016 et des conditions météorologiques rarement clémentes sur les éditions suivantes. Il m’a conservé sa confiance et je l’en remercie. Un énorme merci à mon pote Yves Lara qui m’a amené sur le Championnat, et un clin d’œil à mon vieux complice, notre ’’Achille’’ national qui est une véritable bible vivante en matière de réglementation, et notamment sur le VHC, catégorie dans laquelle je dois encore me perfectionner. Je profite de l’occasion pour remercier Charly et Pati Zumsteg qui m’ont mis le pied à l’étrier, et un grand merci à tous les membres de l’ASA d’Alsace, et notamment à mes fidèles bras droits. »


Propos recueillis par Bruno Valette ©

 


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