La Montagne de père en fils : Guy Poinsignon

Habitués des podiums du Championnat de France de la Montagne Production, Yannick et Christophe Poinsignon doivent cette réussite à leur incontestable talent, mais également à la totale implication de leur père, Guy. Pour les Poinsignon, purs amateurs dans l’âme, la course est une histoire de famille, et en termes d’investissement et de motivation, le papa est toujours aux avant-postes.

Même s’il n’était en rien impliqué dans la compétition automobile, le père de Guy Poinsignon a tôt fait de comprendre que son fils vouait une réelle passion pour la voiture. Et Guy pouvait difficilement rêver de mieux, lorsqu’il se voyait offrir par son géniteur, une fois le permis en poche, une Renault 8 Gordini.

Seule contrainte pour Guy Poinsignon, l’obligation de passer un contrôle anti-pollution, alors qu’à l’époque un manquement à la règlementation pouvait facilement entraîner une amende : « J’avais donc confié ma voiture à un petit garage censé la régler, mais qui au final me l’a totalement déréglée », se souvient Guy. « Comme j’habite à une quinzaine de kilomètres de Marchal Sport Garage, je me suis tourné vers Gérard Marchal. Ce dernier prenait part à des courses, nous en avons discuté, et il m’a fait découvrir la compétition automobile. »

Guy Poinsignon ne tardait pas à s’impliquer en donnant la main pour charger la Ford Escort et apporter son aide à l’assistance : « Et puis lors d’une discussion, il m’a fait savoir qu’il avait une Rallye II à vendre, que ça pourrait être la voiture idéale si je voulais débuter derrière le volant. » Guy se laissait convaincre, et après avoir participé à un slalom avec sa Renault 8 Gordini, il optait pour la Rallye II.

De la Rallye II à la CG en passant par la F2
Pur amateur, Guy se rendait sur les épreuves régionales au volant de sa voiture de course. Ses moyens limités lui interdisant de disposer d’une assistance digne de ce nom, Guy devait tout faire par lui-même : « Je n’ai absolument pas de formation de mécanicien », confie celui qui aujourd’hui gère le montage, les réglages, l’assistance et l’ensemble des réparations effectuées sur la BMW E92 et la CG de ses fistons. « J’ai dû apprendre en autodidacte la mécanique et le pilotage. Je n’avais pas d’autre solution, n’ayant pas les moyens de m’attacher les services d’un préparateur. »

C’est en 1979 que Guy Poinsignon prenait part à ses toutes premières courses de côte au volant de sa Rallye II. Par la suite, deux autres Rallye II se succèderont avant que Guy ne fasse l’acquisition d’une Scora. Guy tentait par la suite l’expérience de la voiture ouverte en faisant l’acquisition d’une F2, plus précisément d’une Pedrazza que l’on retrouve encore aujourd’hui dans le garage familial. A son volant, Yannick n’a pas manqué de s’illustrer à plusieurs reprises en remportant plusieurs victoires au scratch alors que précédemment, son père avait à plusieurs reprises accroché des deuxièmes places, « mais sans parvenir à m’imposer ! J’ai réussi toutefois à accrocher des victoires de classe sur des épreuves comme Turckheim où les plateaux étaient imposants. »

Là encore, faute de budget, Guy Poinsignon devait établir un programme régional, il lui était en effet difficile de prétendre à participer à des manches du Championnat de France de la Montagne. S’il conservait la F2, Guy faisait également l’acquisition, avec un ami, d’une Simca CG, avec l’intention de courir en rallye : « Mais une nouvelle réglementation a alors interdit les Groupes F en rallye et je me suis tourné vers la côte en reconfigurant la voiture. »

Malheureusement, à la fin des années 90, victime d’une violente sortie de route avec la Pedrazza sur la Course de Côte de Longwy, Guy préférait raccrocher après cet accident qui l’avait touché dans sa chair.

Passage de témoin avec ses fils
Mais en 1999, au volant du CG qu’il venait de remonter, Guy mettait le pied à l’étrier à Yannick en disputant quelques épreuves en double monte avec son fils. Rapidement, les fistons voleront de leurs propres ailes et étofferont le palmarès du CG, notamment sur les épreuves du Championnat de France où, tant Yannick que Christophe accumuleront les podiums, Christophe ayant même eu l’occasion récemment à Thèreval et au Mont-Dore de se hisser sur la première marche.

Guy, qui durant toute sa carrière sportive fut d’une exemplaire fidélité à sa discipline de prédilection, pouvait continuer à s’impliquer sur les courses de côte, mais cette fois non pas derrière le volant, mais en étant au petit soin pour ses fils.

Sans l’implication de Guy, Yannick et Christophe ont toujours confié qu’il leur serait impossible non seulement de réaliser les exploits dont ils furent les auteurs, mais également de prendre part à la moindre compétition. Guy Poinsignon gère en effet les voitures de ses enfants avec un soin empreint d’une incroyable méticulosité : « Je prends en charge le montage des voitures, la mise au point de l’ensemble des réglages, le transport sur les épreuves, l’assistance. »

Bien évidemment, son implication lui permet d’avoir son mot à dire quant au choix des voitures : « C’est toujours un choix issue d’une discussion familiale. Pour ce qui est de la BMW de Yannick par exemple, mon neveu qui m’aide à monter les voitures, avait envie de se tourner vers une Z4. Mais je n’aimais pas spécialement la forme de cette auto et j’avais une nette préférence pour la E92. On est donc parti la dessus. »

Deux fils, deux caractères !
Comme pour beaucoup de père de pilote, Guy Poinsignon reconnait qu’il est beaucoup moins stressant de se retrouver derrière le volant que de voir ses fils rouler : « J’ai moi-même était victime d’une sortie de route, et j’ai toujours la hantise qu’ils partent eux-aussi à la faute. Lorsque j’étais moi-même pilote, j’ai été le témoin de drames que je ne peux aujourd’hui occulter. »

Et Guy sait pertinemment que l’affichage d’un chrono ne veut pas systématiquement dire que tout s’est bien passé : « Une année à Limonest, sur une Finale de la Coupe de France, le speaker annonce le chrono de Yannick. Je savais donc qu’il avait rejoint l’arrivée et que je pouvais relâcher la pression. Mais quelques minutes après on m’informait qu’il était sorti après l’arrivée », se souvient Guy sans se départir de son sourire.

Mécanicien, team-manager, Guy Poinsignon doit également composer avec les spécificités de caractère de ses deux fils. Il se doit en effet de les aborder différemment à l’heure où ils quittent les paddocks : « Yannick est toujours d’un calme olympien, imperturbable. C’est un ’’taiseux’’ de nature, à qui l’on n’a pas besoin de donner de conseil. Christophe est plus impétueux, plus facilement décontenancé lorsque l’on rencontre un problème, et il faut par moment ou calmer ses ardeurs, ou le remotiver. »

Sa longue expérience sur les Courses de Côte a permis à Guy Poinsignon de connaitre de nombreuses satisfactions, des moments riches en émotions, et ses deux fils sont à l’origine de nombre de ses intenses sentiments glané au fil des courses : « Nous avons rencontré de nombreuses galères dans la mise au point de la BMW, et Yannick n’a jamais vraiment été chanceux en course. Aussi, lorsqu’il a remporté sa première victoire à son volant, à Turckheim l’an dernier, l’émotion était forte » confie Guy. « La victoire de Christophe au Mont-Dore, sur une épreuve mythique, marque obligatoirement les esprits et ne peux nous laisser indifférents. »

Tout le monde conserve à l’esprit l’édition 2018 de Thèreval-Agneaux, où la course semblait promise à Yannick qui, suite à un problème mécanique devait renoncer. Christophe ne manquait pas alors de reprendre le flambeau pour imposer sa Simca CG Turbo en Production. Une moment d’une rare intensité où la frustration se mêlait à la joie d’une première victoire. « Après, j’ai eu l’occasion à plusieurs reprises de voir mes deux fils sur le même podium, et j’avoue que c’est un énorme plaisir, une extraordinaire récompense pour le travail effectué. »

Si pour cette saison 2020 écourtée pour des raisons sanitaires, les Poinsignon ont préféré ne pas prendre part aux débats pour ne pas entamer leur budget, Yannick et Christophe seront logiquement présents au départ de la saison 2021 : « Mais il faut reconnaitre que l’avenir est incertain. Pour être compétitif il faut disposer de matériel de plus en plus couteux, et nous n’avons pas les financements pour lutter face à une concurrence de plus en plus affutée. J’espère malgré tout que nous serons toujours, dans les années à venir, en mesure de tirer notre épingle du jeu », analyse Guy.

Il faut garder à l’esprit qu’avec les moyens dont ils disposent le Team Poinsignon a dû monter intégralement la BMW avec laquelle évolue Yannick : « Bien évidemment, nous aurions préféré trouver une auto prête à courir, sur laquelle il fallait juste revoir les réglages. Nous aurions gagné énormément de temps et les résultats auraient certainement été bien meilleurs encore. Mais ça ne nous était pas possible de faire l’acquisition d’une telle auto. »

Le Team Poinsignon Compétition compte de nombreux laudateurs, conscients de l’abnégation dont peut faire preuve Guy, qui consacre l’essentiel de son temps aux courses de ses deux fils. Aujourd’hui, Guy veut avoir une pensée pour tous ceux qui soutiennent sa structure, « mais également pour mon neveu Olivier, qui nous a donné un énorme coup de main. Je n’oublie pas l’ensemble de nos partenaires sans qui tout cela ne serait pas possible. Un grand merci à toute ma famille », conclut Guy Poinsignon.

Propos recueillis par Bruno Valette ©

 

 


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