Jean-Michel Lestienne vainqueur de l’Open GTTS/1

Contraint a mettre sa carrière sportive entre parenthèses à cause de soucis de santé, Jean-Michel Lestienne faisait cette saison son retour sur le Championnat de France de la Montagne avec la ferme intention de remporter, comme en 2017, le Challenge Open GTTS/1. Objectif atteint puisque l’ancien pilote moto a dominé la classe dans laquelle s’affrontent les spectaculaires Mitjet.

Si après une carrière sportive au guidon d’une moto dans les années 70 Jean-Michel Lestienne raccrochait la combinaison, il ne restait pas très éloigné des sports mécaniques. Sponsor ou mécène de nombreux pilotes dans diverses disciplines, il devenait rapidement un acteur majeur dans le sport automobile... Soutenir de jeunes talents ne pouvait que lui donner envie d’en découdre à nouveau. En 2015, c’est en circuit qu’il faisait son retour, au volant d’une Mitjet. L’année suivante il se consacrait à la Course de Côte, toujours au volant d’une Mitjet, avec laquelle il remportait en 2017 le Challenge Open GTTS/1.

En 2018, il terminait deuxième de l’Open GTTS/4 après avoir troqué sa Mitjet contre une imposante Ginetta. Mais il retrouvait la petite bombe qui anime la classe GTTS/1 la saison suivante. Par la suite, il ne fera que des apparitions sporadiques, et ne participait pas aux débat en 2021 : « En réalité ma disparition des tableaux remonte à mi 2019 lorsque j’ai fait un infarctus », rappelle Jean-Michel Lestienne. « J’ai été parfaitement « réparé » dans la foulée, mais mes médecins ont préféré que je fasse un petit break de quelques mois après l’opération. Ne parlons pas de 2020 qui a été sacrifié sur l’hôtel de la Covid, et je suis resté très vigilants encore en 2021, raison de ma non-participation au CFM, pour ne faire que trois meetings afin de rester au contact. Ma première course de reprise en quelque sorte, qui se déroulait à Marchampt, se solde par une deuxième place à 600 millièmes au cumul derrière Christophe Demare, qui est au passage un sérieux client. Plutôt bon signe pour une remise en selle ! Ensuite je gagne Chamrousse et Turckheim, juste pour le plaisir. »

Le duo des Jean-Mi fidèle à la Mitjet
En 2022, Jean-Michel Lestienne décidait de s’engager à nouveau sur le championnat, accompagné de son fidèle acolyte Jean-Michel Godet, les deux « Jean-Mi » s’installant à nouveau dans l’habitacle d’une Mitjet : « Pour 2022, la normalité reprenait le dessus, et l’objectif était de réapparaitre au CFM avec le but d’emporter le GTTS1 avec ma fidèle Mitjet, totalement stock depuis 2016, et seulement révisé une fois par an », précise Jean-Michel. « Ce n’est certainement pas la plus performante du plateau du GTTS/1, mais comme je dis, je compense au volant… Cette auto dépourvue de toute assistance m’apporte toujours autant de plaisir. C’est brutal, joueur, délicat à emmener vite, mais quand le tracé le permet, ça fait des temps malgré une petite cylindrée. »

Le changement majeur pour les deux Jean-Michel venait de l’intégration dans une nouvelle équipe : « Pour 2022, nous changions de team, passant de chez Nico Schatz qui ne souhaitait plus s’investir autant en côte, au team MMS (Max Motorsport). C’était alors le début d’une nouvelle aventure avec une jeune équipe dynamique. J’ai simplement récupéré mon auto chez Nico, passé un coup de chiffon, mis de l’essence, et nous avons fait une seule séance d’essais sur le circuit de Bresse juste pour ’’remettre le facteur sur le vélo’’. »

Compétiteur dans l’âme, Jean-Michel Lestienne court avant tout pour le plaisir, mais avec la ferme intention de devancer ses camarades de jeu. Mais après une longue absence, il lui était difficile de savoir s’il serait en mesure de jouer les premiers rôles : « Sincèrement, je ne savais pas à quel niveau je me trouvais, mais l’objectif était bien entendu d’emporter le titre, et de se faire plaisir avant tout. J’ai réussi les deux. Avec mon ’’poto’’ Godet, nous nous sommes véritablement amusés autant sur la piste qu’en dehors… Les réseaux sociaux s’en sont donnés à cœur joie » rappelle Jean-Michel. « Et puis, il faut absolument entretenir cette ambiance bonne enfant sur les courses. Il n’y a qu’en course de côte que nous pouvons encore nous permettre de franchement rigoler. Le ridicule et l’autodérision ne tuent pas. Ce qui n’empêche pas d’être plutôt sérieux et concentrés quand nous sommes au volant. »

Initialement, Jean-Michel Lestienne devait débuter la saison sur les deux manches gardoises inaugurales du championnat, à savoir Bagnols-Sabran et le Col Saint-Pierre : « Pour tout dire, l’auto de Jean Michel Godet n’était pas prête, et je ne me voyais pas commencer la saison tout seul. En accord avec le team, nous décidions tous de démarrer à Abreschviller. »

Et d’entrée de jeu, sur l’épreuve lorraine, Jean-Michel Lestienne allait retrouver ses sensations et la première place en signant un succès en GTTS/1 : « C’est une course que j’affectionne tout particulièrement. D’ailleurs, de mémoire, je crois que j’ai toujours gagné à Abreschviller. J’ai vite retrouvé les bonnes sensations et je me suis rassuré avec une première victoire assez confortable sur mes concurrents. Je redécouvrais mon auto en mode « course », ça change tout ! »

La victoire de Jean-Michel Lestienne sur les Teurses de Thèreval – Agneaux ne souffrira d’aucune contestation, puisqu’il s’imposait avec plus de cinq secondes d’avance sur son adversaire et ami Jean-Michel Godet : « Comme pour Abreschviller, j’aime cette course et son ambiance sympathique. Que du bonheur dans ces grandes courbes rapides. Aucun problème sur l’auto, et je remporte la victoire devant mon compère Godet qui était pour sa part en pleine réflexion sur ses réglages, autant sur l’auto que sur le pilote. L’écart n’est donc pas significatif », précise le vainqueur de la classe.

A La Pommeraye c’est avec un écart de plus de trois secondes sur son ineffable compère que Jean-Michel Lestienne accrochait un nouveau succès : « Autre course de l’Ouest où l’on aime poser ses roues. La météo était loin d’être parfaite et elle a joué des tours à pas mal de pilotes. Je gagne encore une fois devant Jean-Mi Godet qui retrouvait quelques sensations malgré des figures de style dont il a le secret », confie Jean-Michel dans un éclat de rire.

Il était dit que Jean-Michel Lestienne allait vivre une campagne de l’Ouest qui allait se dérouler à la perfection. Le troisième rendez-vous, à Saint Gouëno, lui donnait l’occasion de remporter à nouveau une large victoire : « Ah, Saint Gouëno ! C’est unique. La Bretagne à l’état pur, son festnoz et ses soirées mémorables, ses Anglais avec leurs autos improbables, cette ambiance du bout du monde… Et cette course piégeuse à souhait, rapide et technique à la fois, avec ce fer à cheval mythique. Il faut être à Saint Gouëno si l’on veut gagner un championnat. C’est un tournant psychologique pour le reste de la saison. Je ne rencontre aucun souci avec des reconnaissances parfaites, des montées sérieuses, et une nette victoire à la clef. Rien n’est fait, mais ça rassure pour le reste de la saison », analyse-t-il.

Début juillet, alors que les animateurs du Championnat de France de la Montagne se retrouvaient à Vuillafans, c’est dans la Sarthe que les Jean-Michel passaient un week-end plutôt intense : « Nous étions au Mans Classic avec mon ami Godet, qui pour sa part, participait avec sa TVR, avec malheureusement énormément d’ennuis mécaniques… Le chat noir le poursuit. Pour ma part je faisais un peu de business et du shopping. Cette manifestation reste exceptionnelle, et je conseille à tous d’y aller au moins une fois dans sa vie. »

L’enchainement des épreuves obligeait par la suite les deux protagonistes à faire un choix. Ils décidaient de faire l’impasse sur Dunières pour concentrer leurs efforts sur Marchampt. C’est donc dans le Beaujolais qu’on les retrouvait, mais pour Jean-Michel Lestienne l’approche de cette épreuve n’allait pas lui donner totale satisfaction : « Je ne peux que m’en vouloir. Je réalise des essais parfaits qui présageaient un lendemain favorable. Or quelle mouche me pique ! Dès la première montée de course, je décide de changer de stratégie en entrant avec un rapport de moins dans certains virages, en espérant ainsi avoir plus de peps pour la relance. Quel manque de lucidité. En réalité j’arrête l’auto. Du coup, je prends un peu plus d’une seconde dès la première montée, et je sais qu’à ce stade, je vais cavaler après toute la journée pour remonter au cumul. D’autant plus que j’insiste dans mon erreur lors de la deuxième montée. S’en est terminé pour la victoire même si je réalise le meilleur temps de la catégorie à la troisième montée… Ce fut une belle bagarre avec un écart de seulement 1’’8 au cumul entre les trois premiers. Donc je suis satisfait par cette course très animée, tout en étant forcément déçu par mon erreur », confie Jean-Michel que l’on retrouve dans le sillage de Christophe Demare et de Christian Faury.

Jean-Michel allait par la suite rencontrer d’autres difficultés sur le Mont-Dore où Christian Januel termine en tête du GTTS/1 devant Cédric Boureille : « Le Mont-Dore, je n’y arrive pas. C’est comme ça depuis que je participe à cette course. Je ne trouve pas le rythme, et bien d’autres pilotes rencontrent le même problème. J’avais annoncé la couleur depuis le début de la saison. Je fais le Mont-Dore car ça reste une course incroyable, mais ne comptez pas sur moi pour la gagner. Je passe mon tour. Au passage je prends quand même quelques bons points. On oublie le reste. »

Si l’écart avec Christian Januel était conséquent à l’issue du Mont-Dore, sur la Course de Côte de Chamrousse, c’est avec seulement 662 millièmes d’avance que le même Januel devançait Jean-Michel Lestienne : « Chamrousse, une vraie course de montagne. J’avais prévenu Christian Januel, excellent pilote, d’autant plus au volant de la Mitjet sans doute la plus compétitive du plateau, que je comptais bien lui rendre la monnaie de sa pièce du Mont-Dore… Je réalise le meilleur temps aux essais. Mais Chamrousse reste Chamrousse, et à la première montée de course, nous nous trouvons dans les nuages sur certains passages avec le soleil au travers. Je n’y vois rien. C’est l’ami Godet, qui réalise alors le meilleur temps, à croire qu’il a des yeux de lynx, et je fais seulement le quatrième temps. Il faut se ressaisir. A la deuxième montée, le beau temps est revenu, et je remets les pendules à l’heure. Je fais le meilleur temps devant Christian Januel à plus d’une seconde, et les autres sont beaucoup plus loin. Je sais qu’à la troisième montée, j’en ai encore un peu sous le pied, alors que Christian m’avoue être à l’agonie. Je tiens ma revanche », pense alors Jean-Michel : « Or, le terrible accident de Damien Chamberod se produit, dont la cause est due à une forte dégradation de la route, que certains pilotes, dont moi-même dénonçaient déjà depuis le vendredi, laissant malheureusement envisager un drame prévisible. Ce qui avait été annoncé est arrivé… La troisième montée était annulée par la Direction de Course et le Collège, pour cause de dangerosité de la piste. J’aurais pu regretter cette décision qui m’empêchait certainement de gagner la course, mais en même temps, c’était enfin une sage décision. L’accident de Damien aurait pu être évité si ce sursaut de lucidité avait été présent en amont. »

La Course de Turckheim allait permettre aux Jean-Michel de réaliser un nouveau doublé puisqu’à l’arrivée de l’épreuve alsacienne, Jean-Mi Lestienne mène les débats devant Jean-Mi Godet : « Turckheim, c’est ma course. C’est celle que je préfère de toute. J’y détiens d’ailleurs toujours le record en GTTS/1. Je réalise un weekend solide, sans pression, et le résultat est sans appel pour ce qui sera ma dernière course de la saison, sachant que j’avais déjà le titre en poche depuis Chamrousse. »

S’il était bien présent à Limonest, Jean-Michel Lestienne n’a pas coiffé son casque de pilote, pourtant sa Mitjet était au départ : « Mon auto y était, mais c’est le jeune Nicolas Roche qui était au volant. J’étais néanmoins sur place pour lui donner quelques bons conseils, qu’il a immédiatement appliqués. Résultat, il réalise un excellent chrono juste derrière Christophe Demare. Malheureusement, trop optimiste sans doute, il fait deux tête-à-queue dans les autres montées, et ses efforts ne se concrétisent pas au cumul. Dommage. »

Vainqueur du Challenge Open GTTS/1
A l’issue de cette saison 2022 qui aura été intense, Jean-Michel Lestienne compte cinq victoires de classe, ce qui lui vaut de remporter, comme en 2017, le Challenge Open GTTS/1. De quoi être largement satisfait de sa prestation : « Que du positif. Je me suis notamment rassuré en termes de performances, et ça fait toujours plaisir d’empocher un nouveau titre à mon âge. Ça pousse derrière ! »

Plaisir et résultats étaient au rendez-vous, Jean-Michel n’oublie pas de remercier ceux grâce à qui tout cela est rendu possible : « Tout d’abord, un grand merci à vous tous organisateurs, commissaires, pilotes, intervenants pour votre sympathie naturelle sur tous les meetings. La grande famille de la course de côte n’est pas une légende. C’est toujours un plaisir de se retrouver à vos côtés autour de notre passion commune. Je remercie aussi particulièrement mes sponsors, Vulcanet, Vert l’Essentiel, Le Champagne Smej Vely, Lestienne Motorsport Assurance, RRS, Unil Opal, sans oublier mon team MMS et la famille Dodille toujours à l’écoute de nos moindre problème. Sans eux rien ne serait possible. »

On retrouvera l’an prochain la Mitjet de Jean-Michel Lestienne sur le Championnat de France de la Montagne, mais ce ne sera pas lui qui sera derrière le volant : « Ce qui est sûr, c’est que je ne ferai pas le CFM en GTTS1, car je loue mon auto à un petit jeune qui démarre, avec une coach pro dont je ne peux pas encore dévoiler le nom pour le moment. Il ne peut pas espérer mieux pour apprendre les bonnes bases avec l’auto qui aura gagné le challenge. Néanmoins, perso, mon parcours 2023 passera peut être par le CFM, si la Fédération décide enfin de créer un groupe électrique en côte. Ça fait des années que l’on attend ça. La réglementation existe. Les mesures de sécurité aussi. Qu’attend-on pour lancer ce nouveau groupe ? », questionne Jean-Michel.

« A ma connaissance une série en circuit verra le jour en 2023, l’Electrique Cup Séries 200, avec apparemment l’aval de la fédération », poursuit Jean-Michel. « Donc pourquoi pas en côte ? D’autant plus que cette première avancée aiderait grandement les organisateurs face à la montée des écologistes contre notre sport. En effet, vis-à-vis de l’opinion publique ou des Préfectures, nous ferions preuve de bonne volonté en intégrant désormais des véhicules électriques en vue du profond bouleversement souhaité par le gouvernement depuis plusieurs années. A suivre de près. Moi, je possède déjà l’auto pour être présent », conclut-il.


© Bruno Valette, avec les infos de Jean-Michel Lestienne

 

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