Un succès et un cumul de problèmes mécaniques

Troisième du Championnat de France de la Montagne à l’issue de la saison 2018, deuxième au terme de la saison 2019, Yannick Poinsignon pouvait ambitionner de terminer sa campagne 2021 sur la plus haute marche du podium. La mécanique en décidait malheureusement autrement, le Vosgien allait en effet connaitre un véritable chemin de croix en guise de parcours.

Lors d’un récent entretien durant lequel il évoquait sa saison, Christophe Poinsignon, le frère cadet de Yannick, revenait sur les raisons qui l’avaient incité, lui et tous les membres de sa famille, à faire l’impasse sur la saison 2020 : « La crise engendrée par le coronavirus a modifié sérieusement la donne. Le championnat était réduit à trois manifestations et ce n’est pas réellement ce qui nous convenait le mieux. Il y avait alors trop d’incertitudes, mais surtout, on voulait protéger la famille, et notamment mais parents. Il n’était pas question de faire prendre des risques à mes proches pour aller s’amuser avec nos voitures. Ces divers éléments nous ont incité à ne pas nous engager », expliquait alors Christophe.

C’est pourquoi les deux frères, qui ont pris pour habitude de jouer les premiers rôles sur le championnat Production, étaient absents des débats en 2020 : « Une longue pause, qui m’a semblé interminable », confie Yannick qui depuis 20 ans qu’il sillonne les courses de côte n’avait jamais connu interruption aussi importante. « Normalement, nous avons juste la coupure hivernale qui souvent nous parait longue, mais cette fois c’était vraiment sans fin. »

L’attente était d’autant plus frustrante que Guy Poinsignon, le père de Yannick, avait une nouvelle fois redoublé d’efforts pour que la BMW M3 E92 du fiston bénéficie d’une remise à neuf avant de s’élancer sur les épreuves inscrites au calendrier 2020 : « Nous avions refait un moteur neuf, installé un nouvel autobloquant, et bien évidemment fait subir une révision générale à la voiture. Ensuite, comme nous n’étions pas de la partie en 2020, mon père en a profité pour revoir certains éléments de carrosserie afin de déterminer si on pouvait encore gratter quelques kilos superflus. »

En quête d’un premier titre de Champion de France
Yannick savait donc disposer d’une auto intégralement reconfigurée avec laquelle il devait bien évidemment améliorer les excellentes performances signées jusqu’alors : « C’était l’objectif, avec en tête d’essayer d’aller chercher le titre. On avait le sentiment que nous avions les atouts en mains pour y parvenir, même si nous savions que le combat s’annonçait rude. »

Il est de bon aloi de dire que quand les choses sont mal engagées, il est peu probable qu’elles s’améliorent par la suite. Un adage qui allait malheureusement se confirmer pour Yannick. Et c’est dès les premiers essais qu’apparaitront les premiers problèmes : « Avant le début de saison, nous nous sommes rendus sur le circuit de Chambley pour effectuer une séance de roulage, ne serait-ce que pour retrouver les sensations derrière le volant. Malheureusement, un problème d’autobloquant nous a empêché d’enchainer les tours de piste. » La séance était écourtée à l’issue de trois ou quatre tours et après un passage par le garage pour résoudre le problème, Yannick s’engageait sur la Course de Côte des Myrtilles afin de tester la mécanique de sa BMW avant l’ouverture du championnat.

Sur cette épreuve régionale, c’est une poulie de cible du boitier électronique qui allait faire défaut : « Elle a littéralement explosée, ce qui a occasionné quelques dégâts puisqu’elle avait arraché une durit d’eau, un capteur et son support. Une nouvelle fois mon père a dû mettre les mains dans la mécanique pour réparer tout ça. »

Une réparation qui nécessitait un nouveau passage au banc pour un recalibrage : « Et de ce fait nous n’avons pas eu le temps de chômer avant d’entamer le championnat », se souvient Yannick. Une saison qui débutait en terre angevine, sur la Course de Côte de La Pommeraye, et qui sera le théâtre de nouveaux déboires pour le Vosgien : « Je n’ai fait qu’une séance d’essais libres et en revenant au parc j’ai entendu un bruit suspect dans la boîte de vitesses lorsque je passais la deuxième. Nous avons enlevé le bouchon de vidange, et à ce moment-là une dent d’un des pignon est tombée. Ce qui mettait un terme à notre week-end. »

Immédiatement, le Team Poinsignon Compétition téléphonait au constructeur hollandais de la boîte de vitesses, afin de bénéficier d’un rendez-vous en urgence pour réparer la boîte : « Nous avons démonté la boîte sur place, à La Pommeraye, et ensuite, le mercredi matin mon père partait pour les Pays-Bas avec la boîte de vitesses afin de réparer mais également de vérifier s’il n’y avait pas d’autres dommages. »

Victoire en toute humilité à Vuillafans
Après un aller-retour express et la récupération d’un nouveau pignon de vitesses légèrement différent de celui dont bénéficiait la M3, Guy Poinsignon prenait la direction de Vuillafans où se déroulait le week-end suivant le deuxième rendez-vous du championnat. Et là, l’abnégation dont à l’habitude de faire preuve Guy Poinsignon allait payer puisque Yannick remportait cette 57ème édition de l’épreuve Franc-Comtoise. Un succès qui ne l’incite toutefois pas à afficher une magistrale satisfaction : « C’est toujours plaisant de s’imposer, mais il faut rappeler que Ronald (Garcès) avait dû abandonner. Donc je gagne, mais je ne suis pas pour autant satisfait du résultat parce que je suis loin des chronos réalisés en 2019 », avoue Yannick qui lors de sa dernière participation avait signé une meilleure performance en 2’05’’475, alors que cette année il doit se contenter d’un 2’07’’389.

S’il n’a pas eu l’opportunité d’être aussi performant que voulu, cela provient en partie du fait que pour Yannick le week-end dans le Doubs ne fut pas de tout repos : « Dès le samedi, j’avais de très mauvaises sensations ce qui m’a obligé à repartir chez moi pour aller chercher l’ancien autobloquant et le monter sur la voiture. Le lendemain, dans la première épingle j’avais tout de même le doute que l’auto ne décroche pas, et de ce fait je n’étais pas totalement relâché. »

Le week-end suivant, c’est en Alsace que l’on retrouvait la famille Poinsignon à l’occasion de la Course de Côte de La Broque, où Yannick allait imposer sa BMW M3 devant la Renault Silhouette R.S. 01 de Philippe Schmitter : « C’est un succès rassurant pour la suite puisque nous avons passé un premier week-end sans rencontrer de problème mécanique. J’ai fait mieux qu’en 2018 et j’ai amélioré le chrono de Ronald en 2019, mais je ne suis pas encore totalement satisfait car compte tenu des évolutions apportées à la voiture, je pouvais espérer faire un peu mieux. »

A Dunières, Yannick Poinsignon retrouvait Ronald Garcès. Les deux hommes ne manquaient pas de se livrer un combat acharné à l’issue duquel le pilote de l’Audi R8 LMS Ultra devance la BMW du Vosgien d’une seconde huit : « Là je suis très loin des chronos que j’avais pu signer auparavant. Sur la première montée, j’ai eu une coupure moteur qui me fait perdre du temps. Par la suite, j’ai tenté de mettre des pneus neufs, mais ça ne m’a pas apporté grand-chose. Après, sur la dernière montée, je pense que je n’ai pas suffisamment ’’détoilé’’ les pneus et ils n’étaient pas suffisamment efficaces. D’ailleurs je suis moins rapide sur cette ultime ascension que sur les précédentes. »

Le combat avec Ronald Garcès se poursuivait à Marchampt, toujours avec la même intensité. Dans le Beaujolais, le pilote originaire de l’Aude remportait une nouvelle victoire, une seconde trois devant Yannick : « C’est toujours un peu frustrant de terminer deuxième, même si je ne suis pas largué. Mais je reste en dessous des chronos que j’avais réalisés auparavant. C’est ce qui est rageant parce qu’on travaille sur la voiture pour essayer de la rendre plus compétitive, et on ne récolte pas les fruits du travail accompli. »

Il était dit que Yannick Poinsignon boirait le calice jusqu’à la lie. Sa participation au Mont-Dore se soldait certes par une nouvelle deuxième place, mais les chronos seront là encore bien en deçà de ce que le Vosgien pouvait espérer : « La première montée du dimanche matin n’était pas trop mauvaise. Mais sur la deuxième montée, j’avais le sentiment d’avoir plutôt bien roulé, et à l’arrivée ’’j’en lâche’’ énormément. J’avoue que ça m’a foutu un coup au moral. Je prends quatre secondes dans la vue, de quoi me mettre le doute. Sur la dernière, j’ai vraiment attaqué, et même si j’améliore le chrono précédent, je ne suis pas parvenu à refaire mon temps du matin. De quoi avoir vraiment un doute. » Le doute sera vite estompé en étudiant les datas qui laissaient voir que la M3 n’atteignait pas en ligne droite les vitesses qu’elle devrait logiquement atteindre.

En se penchant sur le problème, la famille Poinsignon désignait comme responsable un bouclage lambda : « En fait, les sondes lambda servent à assurer un bon mélange air-essence, mais en laissant la possibilité au boîtier d’apporter des corrections en temps réel. Comme nous n’avions rien trouvé d’autre, on a pensé que le problème venait de là. »

Finalement, c’est un problème de soupape qui viendra affecter les performances de la voiture et qui sera à l’origine de l’abandon de Yannick à Chamrousse : « Mon premier chrono n’était pas bon, et des spectateurs qui connaissent bien la voiture sont venus me dire qu’elle émettait un bruit bizarre. Nous avons alors vérifié les acquisitions de données, et là j’ai vu que dans les lignes droites je lâchais énormément de temps. Il y avait donc un gros soucis. Avec le V8, ce n’est pas toujours évident de capter les bruits suspects, mais là il apparaissait que quelque chose ne tournait pas correctement. Le bruit perçu semblait provenir d’une soupape d’échappement, et je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas de combustion sur une bougie. Je n’avais pas d’autre choix que d’abandonner. »

Fin de saison prématurée
A ce stade le championnat était joué, et la complexité de la réparation nécessitait d’engager une nouvelle fois de gros efforts que Yannick ne voulait pas consentir : « Christophe a connu son lot de problèmes, moi aussi, et mon père a travaillé comme un forcené pour que nous puissions poursuivre notre saison. Mais à ce stade, il me semblait plus judicieux de nous concentrer sur la voiture de Christophe qui jouait une place sur le podium du championnat, que de nous répartir sur deux voitures au risque de tout perdre. » La sagesse incitait donc Yannick à interrompre sa saison avant son terme.

A l’heure de faire les comptes, Yannick Poinsignon doit se contenter d’une sixième place au championnat, bien loin de ses prétentions initiales : « Après l’énorme travail réalisé pour être réellement performant, il est évident que ce que nous avons vécu est très frustrant. On le sait, c’est le sport mécanique, parfois ça ne veut pas, mais j’avoue que c’est rageant. Quand ce genre de problème survient une fois, voire deux dans la saison, tu fais avec, même si c’est toujours compliqué. Mais là, un tel cumul de déconvenues, c’est hyper frustrant ! » Autre sujet de frustration, Yannick devait faire l’impasse sur les FIA Hill Climb Masters qui était l’un de ses objectifs cette année : « C’est la course que l’on ne veut surtout pas rater. C’est une immense fête de la discipline et c’est toujours très frustrant de ne pas être présent. »

Chez les Poinsignon, on ne baisse pas les bras. On pourrait parfois être tenté de se laisser aller au défaitisme, mais Guy, le père, ne l’accepterait pas. Yannick comme les siens savent donc positiver et toujours trouver du réconfort dans l’adversité : « Le point positif de la saison c’est tout de même la troisième place de Christophe au championnat et un titre supplémentaire en FC », rappelle Yannick.

On l’a vu, la famille Poinsignon forme un clan bien soudé, et c’est bien évidemment vers les siens que vont les premiers remerciements de Yannick. Pour ce qui est des partenaires à qui il veut rendre hommage, il tient à associer l’ensemble de sa famille à ses remerciements : « L'équipe Poinsignon Compétition remercie infiniment la famille, les amis, les mécanos, les photographes et caméramans, les supporters et les partenaires : « Epinal Express » Transports toutes distances à Thaon-les-Vosges, « Fra Presse » Transports, services presse à Richardménil, « L'Grave » Gravage sur marbre à Saint-Gorgon, « Caves Saint-Wendelin » Vigneron récoltant à Niedermorschwihr, « Bar Au Bon accueil » à Hébécrevon, « La nouvelle Prairie» Boucher charcutier traiteur à Niedervisse, « HTR développement » Développeur et metteur au point de boitier électronique à Singrist, « Le vignoble Blanchereau » Vigneron récoltant Domaine du Pélican à la Pommeraye», « RT Design » Impression publicitaire à Thaon-les-Vosges, « ASC Racing » Accessoiristes compétition à Coulanges-la-Vineuse, "Epin automobiles" Concessionnaire Peugeot à Saint-Avold. »

Dans le clan Poinsignon, Guy se présente en véritable Mandarin qui non seulement prend en charge la préparation des voitures mais qui est également une source d’inspiration et de motivation. La BMW de Yannick, comme le CG de Christophe, est actuellement confiée à ses mains expertes, afin que les deux fistons disposent des meilleures armes en 2022 : « L’objectif est de repartir sur un championnat complet, et bien évidemment de parvenir à améliorer mes chronos. On court avant tout pour être de plus en plus rapide, pour aller chercher des succès, et en ce qui concerne le titre, on verra bien. Mais il est clair que ça serait une belle récompense pour tout le travail entrepris », conclut Yannick.


Propos recueillis par Bruno Valette ©

 

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