Mais le plaisir reste entier pour le pilote de la Lotus

Pour son retour sur le Championnat de France de la Montagne, Rudy Ginard a connu une saison compliquée, à cause notamment d’une douleur récurrente au bras droit. Mais le pilote de l’Ain a rempli pleinement ses objectifs, qui étaient de se faire plaisir au volant de sa Lotus Exige. A l’heure de faire le bilan, il occupe la troisième place du Challenge Open GT de Série.

Cette année 2018 sera l’occasion pour Rudy Ginard de disputer sa 42ème saison sans interruption en tant que licencié de la FFSA. C’est en effet en 1976 que Rudy, qui fêtera ses 63 ans en février prochain, prenait part à sa première épreuve. Une trajectoire naturelle pour un pilote qui, selon les dires de sa maman, reconnaissait les voitures au bruit émis par les moteurs, avant même de savoir parler.

L’automobile était donc solidement fixé dans ses gènes, et dès qu’il pu s’installer derrière le volant d’une voiture de course, Rudy Ginard prenait part à sa première course de côte, sur laquelle il brillait au volant de sa Simca Rallye. Son début de carrière sportive était ensuite interrompu par l’appel sous les drapeaux. Mais avant de rejoindre sa caserne d’affectation en Corse, Rudy participait à un Challenge en Karting sur le circuit Bugatti. Sélectionné pour la Finale, il devra malheureusement renoncer, un adjudant peu compréhensif lui refusant une permission pour participer à la Finale.

Rudy n’étant pas homme à avoir des regrets, il acceptait avec fatalisme ce coup du sort. Une fois son service militaire terminé, il décidait de courir par ses propres moyens. Pilote éclectique, curieux de tout, Rudy Ginard décidait de s’engager aussi bien sur des slaloms, des rallyes que des courses de côte. Côté voiture, la variété était également au rendez-vous, puisque l’on a pu le voir à l’époque évoluer aux volants de Rallye I, Rallye II, Ford Escort, Golf GTI, Samba Rallye, 205 et 309 avec lesquelles il disputé deux Challenges Peugeot. Rudy prendra part à des épreuves prestigieuses telles que le Lyon-Charbonnières, le Critérium des Cévennes ou le Rallye du Mont-Blanc.

A 60 ans passé, Rudy Ginard vit toujours sa passion avec la même intensité, en savourant pleinement chacune de ses participations. Solitaire, comme le sont souvent les animateurs du GT de Série, Rudy se déplace seul, avec son camion. Un choix voulu, qui représente parfaitement la philosophie d’une catégorie qui, à son grand dam, attire de moins en moins de pilotes.

Seul petit bémol pour Rudy, le fait que Valérie, son épouse, ne soit pas systématiquement à ses côtés sur les manches du Championnat de France de la Montagne. Elle partage toutefois sa passion, puisque c’est elle qui officie comme copilote lorsque Rudy s’aligne, aujourd’hui encore sur des rallyes.

Durant sa longue carrière, Rudy Ginard a eu l’occasion de croiser un grand nombre de pilotes. Parmi eux, Jean-Noël Krafft, avec qui il décidait de monter une petite structure, au départ sans aucune prétention. Avec l’appui d’Emmanuel Arbant allait naitre le Krafft Racing. Stéphane Krafft prenait par la suite la relève, sachant pouvoir compter sur le soutien indéfectible de Rudy.

L’homme à battre en GT/1
Vainqueur du Trophée GT/1 en 2013, Rudy Ginard remettait son titre en jeu en 2014, face à une concurrence plus affutée, avec comme rivaux des pilotes évoluant aux volants de Caterham et de Berlinette Hommell. Mais Rudy défendait crânement ses chances et parvenait à conserver son titre.

Pour les saisons 2015 et 2016, Rudy Ginard concentrait ses efforts sur la Coupe de France des Slaloms. Sélectionné sur la Finale à l’issue de la saison 2015, le pilote de l’Ain ne pourra pas toutefois honorer sa qualification. Mais il sera bien présent à Lezay, fin 2016, où cette fois il terminait deuxième du GT derrière une autre Lotus Exige, celle de Julien Schneiter.

Dans le même temps, Rudy poursuivait son implication en rallye, et on pouvait le retrouver, accompagné de son épouse, dans l’habitacle d’une Opel Kadett GSI de 1984, engagée par le couple en VHRS : « J’ai racheté cette auto début 2016 et nous avons pris part à trois épreuves. Avec mon épouse, nous avons longtemps roulé ensemble, mais si elle acceptait aujourd’hui de repartir, elle ne souhaitait pas que ce soit en moderne, parce qu’elle voulait aborder la course en toute décontraction. Elle m’a proposé de trouver un autre copilote, mais il était dans mon esprit hors de question de ne pas être à ses côtés, d’où le choix du VHRS. »

Retour sur le Championnat… Pour le plaisir
Après deux saisons passées sur les rallyes et les slaloms, Rudy Ginard décidait de revenir en 2017 sur le Championnat de France de la Montagne : « J’avoue que ça me manquait un peu… Ça fait toujours plaisir de retrouver les mêmes adversaires, avec qui règne une excellente ambiance, et avec qui on savoure des moments de pure convivialité. Cette année, j’ai eu la chance de rester une semaine à Saint Gouëno et de me retrouver avec des concurrents qui eux aussi passaient la semaine en Bretagne. Ça permet des échanges, des moments très sympathiques. Je revenais avant tout pour me faire plaisir, et à ce titre, ce retour est une totale réussite. »

Face à la puissante Porsche 997 GT3 de Dominique Vuillaume, à la BMW Z3 M de Jean-Marc Tissot et à la Porsche 996 Cup de Rémi Courtois, Rudy Ginard faisait figure d’outsider au départ de cette saison : « Je savais que je n’avais aucune chance. Mais je suis revenu avant tout pour me faire plaisir. J’ai motivé Jean-Marc Tissot pour qu’il s’inscrive au Championnat, je me devais de l’accompagner », explique Rudy. « J’aurais pu reconfigurer ma BMW Z3 pour le défier, mais j’aime beaucoup ma Lotus, et je le répète, j’étais là avant tout pour le plaisir. »

On retrouvait la Lotus Exige de Rudy Ginard sur la manche d’ouverture du Championnat, à Bagnols-Sabran ! « C’est une épreuve que j’aime bien, que j’ai disputée pour la première fois en 1975 avec une Rallye II. Il est dommage que cette année encore nous ayons eu la pluie. »

A La Pommeraye, Rudy se retrouvait confronté à la Porsche Cayman de Michel Lamiscarre, et le Basque sortait vainqueur d’une confrontation pas vraiment équitable : « C’est là encore une épreuve que j’aime bien, spécifique de par son tracé. Après, j’ai connu des problèmes de boîte de vitesses qui m’ont un peu pénalisé. Après Bagnols, déjà, j’ai eu le sentiment que quelque chose ne fonctionnait pas, et ça s’est confirmé à La Pommeraye. »

Les soucis de Rudy allaient empirer alors que sa Lotus affrontait le tracé de Saint Gouëno : « C’est ce qui explique que je n’ai pu faire qu’une seule montée, quasiment au ralenti. J’étais seul en GT de Série, et malgré mes déboires je m’impose. C’est une maigre consolation, mais ça me permet de repartir de Bretagne avec de précieux points. »

Une fin de saison douloureuse
Sur le chemin du retour, Rudy Ginard faisait une halte chez son préparateur afin d’estimer les dégâts et de commander les pièces nécessaires à une réparation : « Nous avons récupéré les pièces jeudi, à la veille du week-end de Marchampt en Beaujolais. C’était pour le moins chaud pour réparer en temps et en heure. » Mais pour Rudy, la course dans le Beaujolais allait surtout marquer le début d’une longue période difficile qui, il l’espère, s’achèvera bientôt : « Au mois d’avril, avec l’Opel qui ne dispose pas de direction assistée, j’ai disputé un rallye. Sur une spéciale de 25 kilomètres, je me suis fait mal au bras. J’ai développé une tendinite qui n’allait plus me lâcher. C’était déjà douloureux à Saint Gouëno, mais sur un parcours aussi long que celui de Marchampt, c’était pire », avoue Rudy qui termine troisième derrière Dominique Vuillaume et Jean-Marc Tissot.

La douleur n’allait plus lâcher Rudy qui, sur les épreuves, devait prendre de longues minutes de pause pour se masser le bras droit : « C’est compliqué, notamment moralement, car tu as toujours peur d’accentuer la blessure et que tu n’oses plus rien faire avec le bras endolori. »

A Dunières, Rudy Ginard montait une nouvelle fois sur le podium du GT de Série en terminant troisième, derrière ses adversaires habituels, Dominique Vuillaume et Jean-Marc Tissot : « La dernière fois que j’ai disputé Dunières, c’était en 2014, et l’épreuve avait été interrompue par la pluie. Cette année encore, nous avons dû composer le samedi avec de gros orages, mais sinon c’est une course que j’aime bien, malgré le manque d’adhérence. »

Sur un parcours long de cinq kilomètres, Rudy Ginard allait connaitre un week-end au Mont-Dore très compliqué, sa douleur au bras droit l’empêchant d’être dans les meilleures dispositions : « J’ai vraiment souffert. Je savais ce que j’avais, mais je n’avais pas encore commencé ma rééducation car il fallait pour cela que je mette un terme à ma saison, ce que je ne voulais pas envisager. »

A Chamrousse, Rudy connaitra un week-end plutôt paisible, durant lequel il sera en partie épargné par la douleur : « J’en garde un bon souvenir, tout s’est plutôt bien passé », confie celui qui montait une nouvelle fois sur la troisième marche du podium du GT de Série.

Malgré les douleurs que lui infligeait son bras droit, Rudy allait terminer la saison sur une bonne note, à Limonest, épreuve sur laquelle il livrait, à son sens, sa meilleure prestation de la saison : « Avec Jean-Marc (Tissot) on s’entend très bien, et sur cette course on s’est livré une belle bagarre. Je termine à seulement six dixièmes, c’était très motivant. De plus j’aime bien cette épreuve, son organisation, le paddock original dans le village, et je savais que, quoi qu’il arrive, je terminais en tête du GT/1 sur le Championnat. J’étais donc libéré de toute pression. »

Rudy Ginard se veut fataliste, car malgré les problèmes de santé qui ont affecté sa saison, il considère que le bilan est plutôt positif : « Ce ne sont pas des problèmes très graves, juste pénalisants. J’espère pouvoir profiter de la pause hivernale pour me soigner correctement et repartir dans de meilleures conditions. »

Montagne VHC et rallye au programme 2018
Le programme 2018 de Rudy Ginard n’est pas encore totalement défini, « mais une chose est sûre, je devrais participer à quelques rallyes en VHRS, ne serait-ce que pour partager ces moments précieux avec mon épouse. Cela fait vingt ans que nous roulons ensemble, et j’apprécie tout particulièrement de partager cette passion », confie Rudy. Pour ce qui est de la Course de Côte, Rudy devrait à nouveau animer le Championnat la saison prochaine, même s’il n’a pas encore arrêté définitivement son choix sur la voiture : « J’hésite… Pour mon retour, début 2017, je pensais faire l’acquisition d’une Porsche pour évoluer en GTTS. Mais Nicolas Werver m’en a dissuadé, m’expliquant que seul, il était difficile de gérer les différents paramètres et les réglages durant les courses. J’avais pensé racheter la Peugeot RCZ Cup de Pierre Courroye, mais finalement cette auto doit évoluer en Groupe A, et non en GTTS, ce qui à mon sens n’a aucun intérêt », analyse Rudy.

« Pour l’heure, je dispose toujours de la Lotus, et dans le même temps j’ai racheté une BMW 323 I de 1981, avec laquelle je vais disputer deux ou trois courses en circuit en HTTC. Pour ce qui est de la côte, où je roulerai en moderne avec la Lotus, ou en VHC avec la BMW. Mais j’avoue que j’ai le sentiment que le GT de Série est moribond, ce que je déplore car c’est toute une philosophie et une approche de la course qui s’éteint. Continuer en GT de Série, esseulé, pour faire de la figuration, n’est pas très motivant. »

Mais Rudy Ginard n’abandonne pas pour autant l’idée du GTTS : « Ça me trotte dans la tête. J’ai toujours ma Caterham, ma BMW Z3 M et la Lotus que je vais mettre à la vente. Si je parviens à trouver preneur, avec le budget dont je disposerai, je me verrai bien faire l’acquisition d’une GTTS. Pour l’heure rien n’est encore concrétisé, donc il est plus que probable que je me partage cette saison entre la Lotus, avec laquelle je disputerai quelques courses de côte régionales, la BMW que j’engagerai sur le Championnat de France de la Montagne VHC, et l’Opel avec laquelle je m’alignerai sur des rallyes en VHRS. »

Pour conclure, Rudy veut avoir une pensée pour Valérie, son épouse, vers qui vont ses premiers remerciements : « Elle accepte que je vive pleinement ma passion, et pour cela que je parte durant certains week-ends, ce qui n’est pas toujours évident. Merci également à Sylvain et Vanessa de CPL Sport, ainsi qu’à Gilles Gaillard pour ses articles dans Le Progrès. Je profite de l’occasion pour remercier tous les animateurs du GT de Série, et je regrette d’avoir le sentiment que cette catégorie va disparaitre faute de concurrents. C’est le groupe idéal pour des gentlemen drivers tels que moi, et j’espère vraiment que le GT de Série va perdurer… En ce qui me concerne, j’espère pouvoir fêter mes 50 ans de licence, on va donc se voir encore quelques années », conclut Rudy dans un éclat de rire.

Propos recueillis par Bruno Valette


← Retourner à la liste d'articles