Vainqueur de la classe CNF/2 sur le Championnat

Pour son retour sur le Championnat de France de la Montagne, Bryan Germain avait pour objectif de remporter sa classe. Et si sa saison fut perturbée par un nombre conséquent de problèmes techniques, le jeune pilote de l’Ain est malgré tout parvenu à atteindre son objectif initial.

Oublié les circuits, vers lesquels il voulait initialement se diriger. En l’espace de quelques années, Bryan Germain a fait de la Course de Côte sa discipline de prédilection. Issue du karting, le pilote de l’Ain espérait bien poursuivre sa carrière sportive en circuit. Mais il prenait rapidement conscience, que les budgets nécessaires à la pratique de sa passion, risquaient de compromettre sa progression. L’investissement pour se battre au sommet dépassait les possibilités de Bryan, qui ne tardait pas à se tourner vers d’autres sommets, ceux des Courses de Côte.

La discipline ne lui était pas totalement inconnue. Patrick Germain, le père de Bryan, habitait à quelques kilomètres de Coligny, et passionné de sport automobile s’investissait dans l’organisation de cette épreuve de renom. Bryan ne manquait pas pour sa part de suivre avec un intérêt certain le déroulement de cette course.

Parmi les cadors de la Formule Renault
Lorsque l’on habite à Viriat et que l’on a comme passion la compétition automobile, on peut difficilement passer à côté de la famille Krafft. Patrick et Bryan côtoyaient donc Stéphane et son père Jean-Noël, et c’est d’une discussion avec eux que naissait la possibilité pour Bryan de faire un essai : « J’ai donc arrêté le karting, et je me suis lancé en côte grâce à Stéphane, qui m’a pris sous son aile et m’a guidé. J’ai d’abord pris part à un slalom au volant de la Formule Renault avec laquelle évoluait Antoine Betzel, puis j’ai disputé ma première course de côte à Coligny, en régional. Et le week-end suivant, j’étais au départ de ma première épreuve en Championnat de France au Beaujolais. »

Dès les premiers tours de roues, Bryan Germain prenait conscience que la Course de Côte allait lui offrir des sensations inégalables. Il ne tardait pas à s’installer derrière le volant de sa propre Formule Renault, et à tout juste 21 ans, il disputait sa première saison sur le Championnat en 2013. Il fera alors preuve d’une ascension des plus rapides pour signer dès 2014 son premier succès dans la catégorie sur la Course de Côte de Saint Gouëno. Malheureusement, ses participations suivantes, à Marchampt et à Vuillafans, se soldaient par des abandons suite à des problèmes mécaniques.

Même s’il ne parvenait pas à mener sa saison 2014 à son terme, Bryan Germain avait eu le temps de démontrer son talent et pouvait donc envisager de poursuivre sa progression. Pour cela, il décidait de changer de catégorie et de se tourner vers un modèle particulièrement original : « Par la suite, j’ai fait l’acquisition d’un Proto BRS jusqu’alors jamais vu en Course de Côte, et j’ai entamé des pourparlers avec la FFSA en vue de son homologation. Les choses semblaient bien engagées, mais malheureusement ça n’a pas pu aboutir. C’est réellement dommage car initialement le projet semblait enthousiasmer ceux avec qui nous étions en contact auprès des instances fédérales. Mais au final il nous a été répondu que l’intégration du Proto dans un classe existante n’était pas possible, et que l’on ne pouvait pas créer une classe pour une seule voiture. »

Le Proto BRS d’environ 800 kilos, propulsé par un V6 Nissan de 4 litres développant 380 chevaux n’avait donc pas la possibilité d’évoluer sur le Championnat de France, et c’est en démonstration que Bryan pouvait faire découvrir sa monture : « J’étais dans l’expectative car on m’a laissé entendre que l’homologation serait peut-être possible dans un avenir plus ou moins proche. En attendant j’ai regardé ce qu’il se faisait en Europe, puisqu’un Proto BRS roulait sur le Championnat d’Autriche des Courses de Côte. J’aurais donc peut-être pu évoluer sur des épreuves européennes, mais là on était sur des budgets nettement plus conséquents que je n’étais pas en mesure d’assumer. »

Retour sur le Championnat avec une Norma 2 litres
Si Bryan Germain ne manquait pas de faire du roulage en loisir avec son Proto, l’appel de la compétition se faisait entendre, et l’envie d’en découdre face à des adversaires également : « Pour cela il me fallait trouver une nouvelle voiture, et comme j’ai eu la chance de pouvoir vendre le Proto BRS assez facilement, j’ai rapidement trouvé une nouvelle monture. » Ce sera une Norma 2 litres rachetée à Jean-Yves Bouete : « J’ai regardé ce qui pouvait m’intéresser, ça aurait pu être un Proto Ligier, une Radical, finalement j’ai trouvé cette Norma configurée en CNF/2. »

En 2017, Bryan Germain sera donc au départ de plusieurs épreuves régionales au volant de sa nouvelle monture. L’occasion pour lui d’en découvrir le maniement et de la faire évoluer : « Pour me remettre dans le bain, j’ai pris part à mon épreuve à domicile, la Course de Côte de Coligny. Là, j’ai pu m’apercevoir que l’auto n’était pas réellement performante… En fin de saison, je me suis engagé sur la Course de Côte du Circuit de Bresse, où cette année là il y avait un gros plateau de Proto 2 litres. Et j’avoue que ma performance n’était pas à la hauteur de mes attentes, j’étais assez largement devancé, et j’avais dans l’idée que quelque chose ne fonctionnait pas. »

L’année 2018 sera donc consacrée à la mise au point de sa Norma M20 F : « En premier lieu, nous avons pu nous rendre compte qu’il me manquait environ un quart de la puissance que devait logiquement délivrer le moteur, ça fait beaucoup. Nous avons donc ’’sacrifié’’ la saison 2018 pour préparer au mieux la saison 2019. De ce fait, nous sommes parvenus à avoir un moteur de 320 chevaux, sans commune mesure avec les 200 chevaux dont je disposais quand elle m’a été livrée. »

On l’aura compris, Bryan Germain apprécie les voitures atypiques. Ce qui explique en partie son choix de se tourner vers la classe CNF : « A l’origine, on a cherché une Norma CN/2. Mais rapidement, on a compris qu’avec ce type de voiture, nous allions être bridé en termes d’évolutions. Le CNF offre plus de liberté, ce qui me convient bien, d’autant qu’avec une Norma M20 F, il est impossible en 2 litres de lutter contre les Protos carbones. Là j’avais la possibilité de faire évoluer le moteur, de disposer d’évolution aérodynamiques, d’apporter ma touche personnelle et je voulais impérativement avoir des grosses roues. »

En ayant passé l’essentiel de l’année 2018 à préparer sa voiture, Bryan Germain avait une idée assez précise du niveau de sa monture et des objectifs auxquels il pouvait prétendre : « J’étais conscient qu’il me serait difficile de rivaliser avec les coques carbones qui affichent sur la balance 75 kilos de moins que ma Norma. J’avais donc dans l’idée de défier les Norma tubulaires, M20F et M20B. L’objectif pour moi était de remporter la classe CNF/2 sur le championnat, et de terminer devant les autres Protos tubulaires. Et puis avec la présence de Dorian Ferstler qui cette année débutait la saison en en CNF, j’avais un adversaire performant, et que j’apprécie, à qui me confronter. Nous avons des parcours identiques et j’étais content de défier Dorian qui avait terminé premier du CNF/2 la saison précédente sur le Championnat. »

Cela faisait plusieurs saisons que Bryan Germain suivait les prestations de ses copains sur le Championnat de France de la Montagne, et il se languissait de les rejoindre : « C’est frustrant de voir courir les amis et de rester sur le bord de la route. J’étais vraiment impatient de retrouver l’ambiance du Championnat. Et puis pour moi ça reste l’assouvissement d’un rêve de gosse, et lors des deux saisons que j’ai disputées en Championnat, en 2013 et 2014, des problèmes mécaniques m’avaient empêché de mener à bien l’intégralité de mon programme. Je tenais donc à me relancer en ayant dans l’optique d’être au départ de chacune des manches de mon calendrier. »

Une accumulation de soucis techniques
Un calendrier 2019 qui débutait sur le Col Saint-Pierre, un tracé complexe à assimiler et difficile à aborder pour un pilote qui n’avait eu l’occasion jusqu’alors de prendre le départ de la manche européenne qu’à une seule reprise, en 2014 : « J’avais une toute petite expérience du tracé, et je dois vraiment remercier Kevin Petit qui m’a beaucoup aidé lors des reconnaissances… Cette épreuve est une des plus belles du Championnat, mais également des plus difficiles. Mais quel plaisir ! », analyse Bryan. « Pour ce qui est de la course, j’ai connu mon lot de problèmes, avec une pompe à essence qui m’a lâché, puis des bougies qui ont également fait défection. Heureusement, Marc Pernot m’a dépanné, et là encore je dois le remercier, car sans lui je ne prenais pas part à cette épreuve. »

L’accumulation de souci à bien failli priver Bryan Germain d’un classement sur cette édition du Col Saint-Pierre : « Sur la première montée j’ai fait un tête-à-queue, sur la deuxième j’ai les bougies qui me font défaut, et je devais impérativement faire une montée correcte pour valider un résultat au cumul. Alors il est clair que les performances n’étaient pas au rendez-vous, mais le plaisir était bien là, et j’ai pu une nouvelle fois bénéficier de la solidarité qui règne sur le Championnat de France de la Montagne. »

Disposant de moyens financiers limités, Bryan Germain n’avait pas prévu dans son budget pour la saison 2019 de pneus pluie. A l’heure d’aborder la Course de Côte d’Abreschviller, disputée dans des conditions peu clémentes, il devait se rabattre sur des gommes retaillées de 2013, que lui avait fournies Jean-Yves Bouete : « Et finalement les pneus furent plutôt efficaces puisqu’à l’issue des essais je pointais au quatrième rang des protos 2 litres. Après, je dois reconnaitre que j’ai toujours été à mon aise sous la pluie, la seule chose qui me faisait vraiment défaut à Abreschviller, c’est la boite de vitesses, mal étagée. Je ne pensais pas que sur une route humide on pouvait atteindre de telles vitesses, et j’avais donc conservé une boite courte. Ca m’a pénalisé tout au long du week-end, mais je suis assez content de ma performance puisqu’au final je me classe sixième des Protos 2 litres, mais près de trois secondes devant Dorian (Ferstler) qui évoluait là à domicile. J’avais l’impression que ça allait en évoluant. »

Pour Bryan Germain, impossible de faire l’impasse sur Coligny, la course à la maison, qui même si elle n’est pas inscrite au calendrier du Championnat, reste pour lui un rendez-vous incontournable : « J’habite à 15 kilomètres de Coligny, c’est sur cette épreuve que j’ai disputé ma toute première course, elle a donc un attrait tout particulier pour moi… Il y avait un très beau plateau avec la présence en Protos 2 litres de Marc Pernot, de Thomas Chavot, de Maxime Cotleur et les monoplaces de Marcel Sapin, Nicolas Dumond, David Guillaumard, Cindy Gudet, une vraie concurrence… Finalement je pointe à la troisième place de la classe durant la quasi-totalité du week-end, et Maxime Cotleur me passe pour 26 millièmes sur la dernière montée. C’est un peu rageant, mais malgré tout satisfaisant. »

Une nouvelle fois, c’est avec une boite de vitesses mal étagée que Bryan Germain allait affronter le rapide tracé de Marchampt. En ne disposant pas de rapports suffisamment long, le pilote de l’Ain ne pouvait rivaliser avec ses adversaires : « Il y avait une énorme concurrence et je changeais un peu d’objectif. Dorian étant passé en CN/2, je n’avais plus de concurrent direct, et même si j’essayer de terminer devant les Protos tubulaires, je voulais avant tout m’assurer d’être à l’arrivée. »

Première sortie de route à Vuillafans
Epargné jusqu’alors, Bryan Germain allait connaitre à Vuillafans sa toute première sortie de route. Une moment difficile, et d’autant plus compliqué qu’il n’est en rien responsable de cet accident : « Dans la grande courbe droite qui conditionne la ligne droite avant la dernière épingle gauche, alors que j’étais en pleine charge, à fond de quatre, une vis de biellette de direction a rompu. Je n’ai rien pu faire, la roue a refusé de tourner et j’ai tiré droit dans le talus. »

Non seulement la Norma subissait des dommages qui contraignaient Bryan Germain à l’abandon dès les essais, mais de plus il se retrouvait avec un léger tassement des vertèbres qui entrainait de vives douleurs pendant une longue période : « Moralement c’était très difficile. C’était d’autant plus dur que Vuillafans était la seule course de l’année sur laquelle étaient présente Lola, ma fille, et Prescilia, ma conjointe. J’ai assez mal vécu cette toute première sortie de route en Course de Côte. Le fait de n’être en rien responsable de l’accident remet pas mal de chose en cause. Tu prends conscience que, parfois, tu ne maitrises absolument pas la situation. Dans la pratique de notre sport, on intègre tous que l’on peut être victime d’un accident, mais on connait nos limites et on se doit de ne pas les dépasser. Là, je n’ai pas commis d’erreur, et malgré tout je suis victime d’un accident assez violent, ce n’est pas évident à accepter. »

La livraison des pièces à remplacer suite à cet accident prendra beaucoup de temps, et ce n’est que le vendredi soir, veille de la Course de Côte du Mont-Dore, que la Norma était reposée sur ses roues : « On pensait être prêt, mais on a dû régler à la va-vite, et samedi, l’auto était juste incontrôlable. J’avais le sentiment de rouler sous la flotte, voire sur de la glace tant ça ne tenait pas la route. Nous en avons parlé au sein de l’équipe et on a pris la décision collégiale d’arrêter. Il aurait été ridicule de sortir une nouvelle fois avec une auto qui n’était pas en mesure de signer des performances. »

A l’occasion de la Course de Côte de Turckheim, la Norma de Bryan Germain devait être confiée à Lauriane Fischer. De ce fait, il se devait de la remettre en forme pour honorer cet engagement. L’auto était donc confiée aux mains expertes des mécaniciens du Team Petit CroisiEurope : « Gillou et Sébastien ont réalisé un super boulot et j’ai récupéré une auto parfaitement réglée, ce qui a permis à Lauriane de bien rouler à Turckheim, et moi de pouvoir me rendre par la suite à Limonest l’esprit serein. »

Pour Bryan Germain, l’approche de la Course de Côte de Limonest sera celle d’un rendez-vous de fin de saison. Sans réel objectif a atteindre, il devait se contenter de rouler pour enregistrer un résultat : « Il fallait que je termine, sans tenir compte du chrono, et ça se ressent puisque je me positionne au fond du classement. Lorsque je compare aux chronos que j’avais réalisés en 2013 avec la Formule Renault, je suis cette fois six secondes plus lent… Donc vraiment en mode touriste », reconnait Bryan. « Je n’avais plus roulé depuis le Mont-Dore, je devais donc me réadapter à la voiture et je n’ai pris absolument aucun risque. »

L’envie de revenir plus fort !
A l’issue de cette saison 2019, Bryan Germain figure en tête de la classe CNF/2 au classement du Championnat de France de la Montagne. Objectif atteint, même si sa campagne ne sait pas déroulée aussi bien qu’il l’aurait souhaité : « L’envie était là, mais de nombreux soucis techniques ont perturbé ma saison », confit Bryan. « Sur les premières épreuves, même si je ne signe pas des chronos à la hauteur de mes attentes, j’ai la satisfaction d’être en constante progression. Mais la sortie de route à Vuillafans m’a fait me remettre totalement en question, et par la suite j’ai vraiment roulé sur la défensive. Après l’accident de Vuillafans, j’ai perdu la confiance et l’envie d’attaquer qui va avec. Je termine la saison en ayant comme objectif de devancer Jean-Jacques Louvet. Ce n’est pas lui faire offense que de dire qu’il ne compte pas parmi les plus rapides de la classe, ce qu’il fait à son âge est impressionnant. Mais quand un garçon comme moi de moins de 30 ans espère juste pouvoir rivaliser avec lui, c’est que tu n’es plus vraiment dans la course. »

Malgré tout, Bryan gardera d’excellents souvenirs de cette saison 2019 : « Ce fut une belle aventure humaine, j’ai passé de très bons moments au sein de la structure de Max Motorsport. Les événements m’ont également permis de mûrir, d’appréhender la course autrement. Au débuts des années 2010, lorsque j’évoluais en Formule Renault, je n’avais pas d’enfant, j’avais l’inconscience de la jeunesse. Aujourd’hui, il y a Lola et ma compagne, des projets en dehors de la course, des responsabilités qui font que je réfléchis autrement. »

Cette belle expérience humaine, Bryan l’a partagée avec ceux qui furent cette année à ses côtés et qu’il veut remercier : « Avant tout je veux remercier Ricmas, une société d’équipements sportifs qui m’a fourni cette saison tout ce dont j’avais besoin en m’habillant de la tête aux pieds. »  Bryan veut également remercier Patrick, son père, « qui fut en 2013 l’élément déclencheur et qui a fait beaucoup de sacrifices pour que j’assouvisse cette passion. Merci à Prescilia, ma conjointe, qui fut un soutien moral tout au long de la saison et qui a su trouver les mots pour me rebooster. Merci au Team Max Motorsport, à Sylvain, Damien et Aurore Dodille, à Nicolas Menetrier et à Fred Renard. Merci également à Kevin Petit qui m’a vraiment aidé tout au long de la saison, et qui fut lui-même l’auteur d’une saison exceptionnelle, et au Team Petit qui a remis la voiture en forme après ma sortie de route. »

On ne devrait pas revoir Bryan Germain en 2020 derrière le volant d’une voiture de course. Différents projets personnels seront en cette année sa priorité : « Mais il n’est évident pas question que je tire un trait sur la Course de Côte, elle fait partie intégrante de mon ADN. Mon rêve serait de courir avec une auto telles que celles qui évoluent en Europe et qui sont issues du DTM ou du WTCC. Mais en France ce n’est pas possible », commente Bryan. « Aujourd’hui, je n’ai pas envie de revenir pour faire de la figuration. Je préfère attendre et revenir bien armé, avec une auto compétitive. »

 

Propos recueillis par Bruno Valette ©

 

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