Rémi Courtois fait l’apprentissage de sa Seat

Après avoir animé la catégorie GT de Série au volant d’une Porsche 996, Rémi Courtois faisait en 2019 son retour sur le Championnat au volant d’une Seat Léon Supercopa. Une saison d’apprentissage pour le pilote de l’Yonne, qui s’est surtout attaché à cerner les spécificités et la complexité de sa nouvelle monture.

Footballeur, skieur, parachutiste, pratiquant de nombreux arts martiaux… S’il est un sportif émérite, Rémi Courtois est avant tout un bon vivant qui semble toujours aborder la compétition en toute décontraction et avec le sourire aux lèvres… Mais ne nous y trompons pas, derrière le gouailleur se cache un vrai compétiteur, qui depuis ses débuts en rallye en 1985 a accumulé bon nombre de trophées.

La Course de Côte, Rémi Courtois la découvre en 2016 lorsqu’il s’installe derrière le volant d’une Porsche 996. Rapidement, il acquiert une réputation de pilote spectaculaire. Mais spectacle et performances font rarement bon ménage dans la discipline, et Rémi devra rapidement adopter un pilotage plus ’’coulé’’ pour venir jouer les premiers rôles dans le GT de Série.

Après avoir terminé les saisons 2015 et 2016 sur le podium du GT de Série, Rémi allait connaitre une saison 2017 bien plus difficile, marquée par des nombreux problèmes qui l’obligeront à mettre la compétition entre parenthèses… Il faudra attendre 2019 pour le voir faire son retour sur le Championnat, au volant d’une nouvelle monture, une Seat Léon Supercopa.

De la Porsche 996 à la Supercopa
Après une année d’apprentissage et quatre saisons durant lesquelles il enchainait les bons résultats, Rémi Courtois avait le sentiment d’être parvenu ’’au bout’’ de sa Porsche  : « Se posait alors à moi la question de refaire intégralement la voiture, ce qui n’était peut-être pas le plus judicieux sur une 996, ou de passer à autre chose. » Finalement Rémi décidait de changer de monture et il portait son choix sur une Seat Léon Supercopa.

Un choix mûrement réfléchi, qui devait correspondre aux attentes du pilotes de l’Yonne : « La Supercopa est une auto plus moderne, qui offre un rapport poids / puissance / prix performance nettement plus intéressant, à mon sens ce qu’il y a de mieux actuellement sur le marché », analyse-t-il.

Le temps de la réflexion sera conjugué avec ses disponibilités, puisqu’au début de l’année 2018 Rémi Courtois cessait ses activités au sein de la Police Nationale, pour fonder sa propre entreprise, AT’ Risk : « Je reste malgré tout dans mon domaine de prédilection qui est le conseil en conduite à risque. En clair, j’interviens auprès des entreprises en ayant développé le programme que nous avions mis en place auprès des jeunes conducteurs lors de mes interventions dans le cadre de la Police Nationale. Aujourd’hui, je propose des stages pour les entreprises tout en poursuivant mes activités dans le cadre de rencontres lycéennes. A ce titre, l’idée est de parler aux jeunes en évitant les tons dogmatiques et paternalistes et en employant leur langage et leurs façons d’appréhender les choses. »

L’association MV Racing au sein de laquelle œuvre Rémi Courtois, fête cette année ses 30 ans : « Il était pour nous l’heure de faire un bilan des courses, mais également des sessions de prévention que nous avons organisées et qui nous ont permis dans le cadre du bilan prévention d’intervenir auprès de 250.000 jeunes. Ce n’est pas rien ! »

Apprentissage difficile !
Evoluer au volant d’une Supercopa en ayant auparavant affronté les épreuves dans l’habitacle d’une Porsche est synonyme d’un changement radical d’univers : « Je savais que j’allais devoir passer par un temps d’adaptation, mais je pensais qu’il serait plus rapide », reconnait Rémi en toute honnêteté. « J’étais un peu prétentieux en estimant que sans passer par des séances sur circuit ou des essais préparatoires, j’allais rapidement cerner le maniement de la Seat. Mais aux dires des trois ’’Mousquetaires’’ du Groupe A – Francis Dosières, Antoine Uny et Jérôme Janny – ce n’est pas aussi facile que ça. La Supercopa à des spécificités dans le maniement de la boite de vitesses et de la gestion moteur qui nécessite un temps d’adaptation conséquent. Par exemple, le moteur doit être utilisé dans un plage très précise, dans le cas contraire, il est redoutablement inefficace », analyse Rémi.

Rémi Courtois n’abordait donc pas cette saison 2019 dans les meilleures conditions, puisqu’en manque de préparation, et à nouveau seul, ce qui allait rapidement lui causer quelques désagréments : « C’est initialement un choix de tout faire seul : Déplacements, assistance, montages et démontages de la structure, logistique. Mais aujourd’hui, ça devient pesant et il serait préférable que j’intègre une équipe, ne serait-ce que parce qu’il est primordial d’avoir des échanges durant le week-end. Humainement, ça devient compliqué d’être seul. »

L’approche de la course en solitaire pénalisait également Rémi Courtois dans sa gestion des reconnaissances : « Je me déplace sur les épreuves avec mon camion d’assistance et je n’ai donc pas de voiture pour reconnaitre. Alors évidemment, il se trouve toujours des âmes charitables pour m’embarquer avec eux lors des reconnaissances, mais l’approche n’est pas la même que si tu es derrière le volant. La Course de Côte c’est l’école de l’exactitude, et là je suis un peu dans le vague. On ne peut pas prétendre signer des bons chronos dans ces conditions, par contre on peut facilement se faire peur. »

Après avoir fait une demi-douzaine de tours sur le Circuit du Bourbonnais, sans disposer des conseils avisés d’un pilote ayant déjà une expérience de la Supercopa, Rémi Courtois se lançait sur le Championnat avec comme seul objectif de découvrir et d’apprendre le maniement de sa Léon : « Il fallait que j’intègre l’utilisation des palettes au volant, d’une auto qui ne dispose que de deux pédales – accélérateur, freins -  d’une boîte de vitesse qui enregistre le passage d’un changement de rapport, mais qui ne devient effectif que lorsque le moteur est au régime adapté, et l’effet de sol qui était pour moi une nouveauté puisque je n’avais jamais roulé avec une auto qui dispose d’un fond plat. »

Pour débuter, à Abreschviller, Rémi Courtois allait devoir composer avec un paramètre supplémentaire, la pluie… Une difficulté dont il se serait bien évidemment passé : « Ces autos ne sont pas totalement étanches, et on doit donc souvent composer avec de la buée. Lors des vérifs, j’apprends que la Supercopa doit disposer d’une ventilation, que c’est obligatoire… Je n’en avais pas... Je me retrouve devant le Collège qui me signifie ce manquement. J’étais dans l’attitude du gamin qui a fait une erreur, ce qui n’est du tout mon trip, ma longue carrière dans la police ne m’a pas habitué à cette position », plaisante Rémi. « Donc d’une part j’étais en galère avec la buée, on me signifie que j’étais en faute, et je devais tout apprendre de la voiture sur une route détrempée… Un excellent week-end », ironise Rémi. « Ce fut une course catastrophique. En bon compétiteur j’ai eu le malheur de regarder les chronos qui me font savoir que sur une des épreuves les plus courtes du championnat, je me fais coller une vingtaine de secondes au cumul par les trois costauds… J’ai eu peur de payer cher par la suite. »

C’est avec une Supercopa disposant d’une ventilation, trouvée par Francis Dosières, que Rémi Courtois se présentait à Thèreval, où les concurrents devaient composer avec une météo alternant pluie et soleil : « Ce ne fut pas simple là non plus. Mon objectif était alors d’essayer d’aller vite sur le sec pour voir par la suite quel était le niveau d’adhérence de la voiture sous la pluie. Pour moi c’était compliqué, et je suis encore très éloigné des autres. »

S’il reconnait apprécié particulièrement le tracé de La Pommeraye, Rémi Courtois s’était préparé à aborder l’épreuve angevine sous la pluie, histoire d’être psychologiquement en phase avec l’approche du week-end : « Déjà, ma connaissance du tracé faisait que je savais que j’aurais plus de facilité. Effectivement, ça allait un peu mieux et j’ai découvert lors de discussions avec d’autres concurrents, que sur cette auto il y a une nécessité impérieuse de rouler avec des gommes neuves. Effectivement, il s’est avéré que le Seat tolère mal les gommes usagées, et qu’en optant pour des pneus neufs j’étais tout de même nettement plus à mon aise. »

Une activité professionnelle plus intense que prévue obligeait Rémi Courtois à faire l’impasse sur Vuillafans, on retrouvait donc le pilote de l’Yonne à Dunières, où il allait poursuivre sa progression, et se battre tout au long du week-end avec la Mitsubishi d’Abel Sahoui : « Je savais qu’Abel ne roulait pas avec sa propre voiture et qu’il ne se livrait donc pas totalement. Mais je connais bien la Mitsubishi pour avoir roulé durant 7 ans en rallye à son volant, et j’avoue que je suis assez satisfait d’avoir pu rivaliser avec lui à Dunières. C’est un motif de satisfaction car j’avais le sentiment de ne pas être totalement à ’’la ramasse’’, c’était bon pour la confiance. Et puis ça fait un bien énorme de rouler enfin sur le sec. »

Sur le Mont-Dore, Rémi Courtois terminera son week-end prématurément en abandonnant à l’issue de la première montée de course : « Lors des essais, je me suis présenté au départ à 8h15, et finalement, je ne suis monté qu’à 11h00. La personne qui gérait la prégrille m’a expliqué que si j’avais attendu 2h45 c’était pour fluidifier les montées en faisant s’élancer les voitures dans l’ordre des numéros de course. Je n’en voyais pas l’intérêt sur les essais, et ça a eu le don de m’irriter un poil. J’étais là en famille, en vacances, et ça ne devait pas se passer comme ça. »

Rémi Courtois n’était alors plus dans sa course, et pour la première fois de sa carrière, le pilote de l’Yonne a eu un mauvais sentiment : « Je ne veux surtout incriminer personne, c’est juste un sentiment. J’ai ressenti comme un flottement dans la prise de décision des officiels, personne ne semblait en mesure de prendre les bonnes décisions, et je me suis dit que s’il arrivait quelque chose, je n’avais plus l’assurance que les décisionnaires soient en mesure de prendre rapidement leur responsabilité. Je vais être totalement honnête, je me suis fait peur. Ce n’est peut-être pas justifié, mais lorsque les choses ne sont pas carrées, bien posées, j’ai du mal... Je le répète, je n’incrimine personne, c’est un sentiment, qui m’a poussé à ne pas poursuivre. Mon ancien navigateur, qui était présent, m’a avoué qu’il ne m’avait jamais vu comme ça. »

Pour conclure sa saison, sur la Course de Côte de Turckheim, Rémi Courtois devait une nouvelle fois composer avec la pluie : « Le tracé de cette épreuve est magnifique, et même si cette année les conditions étaient particulières avec une météo capricieuse, ça s’est plutôt bien passé pour moi. J’ai tout de même dû stopper avant la fin, parce que j’avais un énorme bruit sur une suspension avant, dont je n’arrivais pas à déterminer l’origine. J’ai préféré m’arrêter plutôt que de prendre des risques inconsidérés. Mais comme la dernière montée n’a pas eu lieu, je n’ai pas été pénalisé. »

De nombreux enseignements utiles pour l’avenir
Même si les résultats enregistrés par Rémi Courtois ne sont pas à la hauteur de ses attentes, le pilote de la Seat peut tirer un bilan positif en ce sens qu’il a été en mesure de progresser tout au long de la saison : « Ce qui est tout de même logique puisque je partais de rien, le contraire aurait été très inquiétant », estime-t-il. « J’ai rapidement compris que je ne me battrais pas avec les autres cette année. La leçon pour moi c’est que l’on ne joue pas lorsque l’on n’a pas d’atout. Mais ce n’est pas grave, cela m’a permis d’apprendre », confie Rémi qui a suffisamment d’expérience pour savoir analyser ses prestations. « Durant cette année 2019, j’ai pu tirer de nombreux enseignements qui me seront utiles pour la suite, mais je ne cache pas que je reste tout de même un peu frustré car j’avais la prétention de faire bien mieux en termes de sensations. »

Avant de conclure, Rémi Courtois veut profiter de l’occasion pour faire passer un message : « J’ai eu l’occasion de m’investir dans l’organisation d’épreuves, je sais donc quelles sont les difficultés rencontrées par les bénévoles et je tiens vraiment à leur rendre hommage. Ceci étant dit, j’ai pu constater que sur certaines épreuves, la parole des pilotes – qui rappelons-le paient un engagement qui est loin d’être modique – n’est pas entendue. L’évolution des épreuves ne peut se faire que par la concertation avec l’ensemble des acteurs, et il est à mon sens impossible de faire l’économie d’un dialogue avec les pilotes. »

Pour ce qui est des remerciements, les premiers mots de Rémi Courtois vont vers sa famille, soutien indéfectible depuis de nombreuses années : « Un grand merci en premier lieu à mon épouse, Flavie, et à mes enfants Nicolas, Marion, Théo et Lilou. Ils sont avec moi d’une extraordinaire patience et j’apprécie réellement le soutien de Flavie qui, même si elle est très peu présente sur les courses, est toujours un soutien sans faille. Nicolas est aujourd’hui Docteur en Génie Mécanique, il travaille aux Etats-Unis mais suit les épreuves via internet. Théo et Marion sont venus cette année m’accompagner sur certaines épreuves, et la petite dernière Lilou a été un peu déçue cette année de voir que papa n’a pas ramené de coupes… J’associe mon ancien navigateur, Alain à mes remerciements. Je tiens bien évidemment à remercier l’ensemble de mes partenaires, tant ceux qui sont une aide dans le domaine de la prévention que ceux qui me soutiennent dans mon implication sportive. Je n’oublie pas les organisateurs, les officiels et bien évidemment tous les commissaires qui sont sur le bord de la route, pour qui j’ai une admiration sans limite tant leur abnégation est grande. Je n’oublie pas ceux qui sont sur les parcs et qui doivent parfois subir les remontrances de certains concurrents quelques fois peu compréhensifs. »

Pour la saison 2020, Rémi Courtois a l’intention d’être au départ de six à huit épreuves du Championnat de France de la Montagne : « Je ne sais pas si je m’engagerai sur le Championnat car j’ai encore beaucoup à apprendre avant de prétendre à un résultat. Mais je serai bien présent au volant de ma Seat Léon Supercopa sur les épreuves que j’apprécie et où j’ai la garantie d’être bien accueilli. Pour l’heure je vais essayer de faire un minimum de roulage avant le coup d’envoi de la saison », conclut Rémi.


Propos recueillis par Bruno Valette ©

 

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